samedi 22 janvier 2011

Entretien avec Jean-Claude Pressac

Après avoir effectué un premier entretien avec M. Pressac, ce dernier a estimé qu'il
était nécessaire de le remanier entièrement. L'entretien qui suit n'est donc pas une
retranscription fidèle de l'enregistrement. Ce texte a été rédigé puis saisi sur
ordinateur par Jean-Claude Pressac; nous le reproduisons tel qu'il nous a été remis,
sans corrections. Certaines questions n'ont pas été posées par l'auteur. Il va de soi
que les propos de Jean-Claude Pressac n'engagent ni Valérie Igounet, ni les éditions
du Seuil.

Pourriez-vous évoquer votre itinéraire jusqu'aux années quatre-vingts? Comment
devient-on révisionniste?
Peu après le procès d'Eichmann à Jérusalem, j'ai lu La mort est mon métier,
autobiographie romancée par Robert Merle du premier commandant du camp
d'Auschwitz, Rudolf Höss. Très jeune, vers dix-huit ans. Comme j'envisageais alors
de préparer l'École Militaire de Saint-Cyr, le livre de Merle m'a fait prendre
conscience de la nature et de la limite des ordres, qu'en tant qu'officier, j'aurais à
recevoir et à donner. Pourrais-je, comme lui, obéir aveuglément et faire anéantir des
centaines de milliers de personnes sans frémir? Plus prosaïquement, pourrais-je
ordonner à une centaine ou plus de jeunes hommes d'aller se faire tuer et, dans la
plupart des cas, pour rien? La réponse fut non. J'abandonnai l'idée d'une carrière dans
l'armée et devins pharmacien.
Vers trente ans, j'ai entrepris de réaliser un ouvrage de politique-fiction - une
chronique politico-militaire d'un autre futur - dans lequel j'étudiais la possibilité d'une
victoire complète du Troisième Reich en Europe, se terminant pourtant par une
défaite dans les années cinquante, entraînée par la puissance nucléaire américaine.
Contrairement à maints auteurs qui définissent une fois pour toute le cadre de leur
livre, chacun de mes chapitres devait se tenir dans un lieu différent et traiter d'un
thème particulier. Furent écrits plusieurs chapitres: sur l'action de la Milice
française, sur la dernière opération de ce corps le 6 juin 1944, sur la semaine de la
«Grande Pagaille» à Paris en juillet 1944 avec l'intervention de la division SS anglaise
«Black Prince», sur la formation des officiers SS européens à Bad Tölz fin 1944 et sur
les deniers combats en Écosse de l'été 1945, achevant en août la campagne
d'Angleterre et provoquant la déclaration de guerre des États-unis en septembre 1945.
Le premier et le dernier des chapitres écrits étaient axés sur les questions atomiques.
Les suivants devaient porter sur les armes secrètes à Peenemünde et en Prusse
orientale, les traces de la «solution finale» à Auschwitz, la guerre de partisans en
Yougoslavie, la colonisation allemande de l'Ukraine, etc.

Mon écriture dépendait de mes ressources financières et de mes voyages de repérage
pendant les vacances. Je devais connaître les endroits - région, cité ou bâtiment - que
j'évoquais. Ainsi, la visite de Zagreb, anciennement Agram, la capitale de l'État
croate, trois fois projetée, fut à chaque fois reportée, et ne put s'effectuer. C'est au
cours du travail préparatoire sur le chapitre d'Auschwitz que ma recherche a mal
tourné et ce, fin octobre 1979.

Pourquoi dites-vous que votre recherche a mal tourné?
Si elle avait bien tournée, c'est-à-dire si j'avais réussi à obtenir une documentation
claire et précise sur le K. L. Auschwitz, mon récit de ce futur «autre» serait achevé
depuis belle lurette, aurait été publié ou non, et je ne serais pas en train de répondre à
vos questions.
En août 1966, bien avant que je me mette à écrire, j'avais visité le musée d'Auschwitz
et fus probablement un des rares Français de ma génération à m'y rendre. Ayant
acheté sur place quelques livres, lorsque j'ai voulu m'en servir en 1979, le résultat fut
désastreux. Soit les explications des historiens polonais étaient lamentables, soit je ne
compris rien. Mes souvenirs ne m'aidèrent pas plus. Je situais mal les crématoires, en
saisissais encore moins l'arrangement intérieur que Robert Merle avait pourtant décrit
dans son roman (une immense salle de gazage pour 3.000 personnes desservant celle
des fours par quatre ascenseurs). Par chance, la télévision allait diffuser le feuilleton
américain Holocauste, diffusion que j'attendis avec une impatience fébrile. Ce que je
n'avais pas prévu, est que la scène, censée avoir été tournée devant les fours ronflants
d'Auschwitz, l'avait été à côté d'un four de Mauthausen. J'avais négligé que la vérité
historique est absente des productions américaines destinées avant tout à produire de
l'argent. Mais, sur le moment, ignorant ce «détail» gênant, je nageais en pleine
confusion, n'arrivant plus à faire correspondre cette scène et mes souvenirs. A
Birkenau en 1966, j'avais vu des ruines, mais aucun panneau n'indiquait leur fonction
ni n'expliquait ce qui s'y était passé. Sur place, j'avais rencontré un gardien polonais,
ancien membre d'une brigade internationale en Espagne, qui me raconta que dans le
crématoire VI - alors qu'il n'en existait que cinq - les gens étaient électrocutés et
incinérés automatiquement, à la chaîne. Il répétait les allégations d'un article de la
Pravda Chroniques de la libération du camp, 1945 , de ce qu'on a appelé par la suite L'Album d'Auschwitz
(photos diffusées initialement par le musée juif de Prague) et de «L'Album de la
direction des constructions SS» (retrouvé et acheté ultérieurement par le Yad
Vashem). Pour la dernière source, les détenus travaillant au laboratoire photo du camp
avaient réalisé clandestinement de petits clichés par contact direct entre le négatif et le
papier réactif et les avaient placés dans deux bouteilles qui furent enterrées. Une
seule, avec une cinquantaine de photos, resta intacte et fut récupérée à la libération.
J'avais commencé à douter de l'existence même des crématoires avant mon
déplacement en Pologne. Or, sur plusieurs photos présentées, je les voyais
parfaitement et même en cours de construction. M'ont particulièrement intéressé les
plans d'implantation SS de ces bâtisses que les Soviétiques avaient filmés. A l'époque,
mon allemand était laborieux. Par contre, j'ai un coup d'oeil d'architecte inné et un plan
me renseigne plus sur un bâtiment ou une installation qu'un dossier descriptif. J'avais
alors presque atteint mon but: fixer le cadre d'évolution du principal personnage de
mon livre dans le complexe concentrationnaire d'Auschwitz-Birkenau. Il ne me
manquait encore qu'une chose et ma recherche était terminée: le ou les plans des
crématoires. Ce que j'ai demandé - comme on lance une bouteille à la mer - au
conservateur. Ils existaient et Iwaszko m'a apporté les originaux dessinés par la
Direction des constructions SS du camp (la «Bauleitung»).Ce que j'allais
découvrir dans ces «bleus» - dont certains étaient magnifiquement colorés -
bouleversera de fond en comble ma dite «calme petite vie de pharmacien de
banlieue».
Dans sa présentation des plans, Iwaszko commit une énorme faute, involontaire, car il
était dans l'impossibilité de s'en rendre compte sur le moment. Sont conservés au
musée d'Auschwitz dix-sept plans des crématoires - II, III et IV (valables aussi pour le
V) - établis par la Bauleitung SS, sans compter ceux des entreprises civiles de la
HUTA de Kattowitz et de la Konrad SEGNITZ de Beuthen (neuf en tout). Le premier
plan SS des crématoires de Birkenau se rapportant au II fut dessiné le 15 janvier 1942
et le dernier le 19 mars 1943, peu avant son achèvement. Or, il existe une différence
radicale entre ces plans. Sur le premier, le bâtiment n'est pas criminel au moment de
son dessin. Sur le dernier, plusieurs modifications ne peuvent s'expliquer que parce
que le bâtiment est devenu un instrument criminel.
A l'époque les historiens croyaient que, selon les dires de Rudolf Höss, l'ordre
d'extermination des juifs avait été donné par Himmler à la fin de l'été 1941. On sait
maintenant que Höss s'est trompé de date et le reçut, pour son camp, début juin 1942.
Conséquence directe de cet ordre prétendument donné à l'été 1941, un premier gazage
expérimental avait été pratiqué dans les caves d'un bloc du camp principal du 3 au 5
septembre 1941 et la Bauleitung SS d'Auschwitz avait dessiné en janvier 1942 le plan
d'un crématoire avec chambre à gaz, permettant d'accomplir cette mission. Donc,
Iwaszko, croyant bien faire et les sachant «chronologiquement correct», me montra
les plans de la série dite «930» de début 1942, persuadé de leur criminalité. En effet,
le n· 932, plan du sous-sol, comportait deux morgues semi-enterrées, désignées de
«Leichenkeller» ou «L-Keller» 1 et 2. La 1 était ventilée, avec aération et désaération.
La 2 ne l'était pas. Il était très tentant et même logique d'affirmer que la 1 était une
chambre à gaz d'où le toxique gazeux pouvait être extrait, alors que la 2, sans une telle
installation, servait de vestiaire aux victimes. Comme, pour un oeil non averti, tous les
plans se ressemblaient, n'étaient montrés que les premiers du crématoire II, de belle
facture, au contraire du dernier, à peine lisible.
Un aménagement du «932», dessiné le 23 janvier 1942, m'a paru bizarre. L'entrée de
la «L-Keller 1» était équipée d'une porte à double battant. J'ai pensé qu'il serait plus
rationnel pour une chambre a gaz de m'en avoir qu'un seul. Puis, je suis passé à la
disposition du crématoire IV. Sur le plan n' 2036 du II janvier 1943, les victimes
pénétraient dans une grande salle centrale, étaient dirigées vers trois pièces de gauche
où elles étaient gazées, traînées de nouveau au centre de la bâtisse et incinérées au
[617] fur et à mesure dans un four à 8 creusets incinérateurs se trouvant à droite. Ce
circuit était absurde et je l'ai fait remarquer à Iwaszko. Il aurait dû être ordonné
comme suit: vestiaire donnant dans une chambre à gaz, débouchant elle-même sur une
salle des fours.

Iwaszko commit alors une erreur psychologique grossière. Au lieu de m'avouer qu'il
n'y comprenait rien lui-même, que ces plans posaient problème, il préféra m'imposer
ces données inexpliquées en déclarant -. « Sie müssen das glauben [Vous devez croire
cela]». Propos d'une maladresse insigne, tenu à un Français, membre d'un peuple
réputé pour son esprit cartésien et son sens critique. Iwaszko venait de déclencher
mon révisionnisme.
Il aurait pu «répondre» autrement à mes doutes, en me montrant les plans successifs
du crématoire II et, en particulier, le dernier dessiné au moment de sa livraison en
mars 1943. Aurais-je été capable alors de distinguer les différences entre ces plans? Je
pense que oui - vu mon approche exclusivement architecturale - et les aurais signalées
à Iwaszko. Conjoncturer de la suite des évènements à partir de cette hypothèse est
difficile. Surtout qu'Iwaszko, constatant mon attitude réservée à l'égard de ses
explications «crématoires», ajouta: «Ne faites pas comme Laurisson!» J'appris que ce
Laurisson était un «très mauvais» Français qui était venu, lui aussi, aux Archives du
musée et qui, comme moi, ne trouvait pas très clairs les commentaires des historiens
polonais sur les crématoires. Ce fut la première fois que j'entendis parler de Faurisson.
Malheureusement, la deuxième intervint le lendemain, le 1er novembre 1979, le jour
de la Toussaint. Ayant eu des problèmes de démarrage avec ma voiture de location au
moment de mon départ du musée, j'ai demandé de l'aide à des compatriotes se
trouvant sur place, d'anciens détenus revenus en pèlerinage. Ils furent très intéressés
par ma démarche, mais virent aussi ma réserve sur certains points. Et là, de nouveau,
apparut dans la conversation ledit Laurisson, modèle à ne pas suivre. Ces deux
mentions trop rapprochées de cette personne, qui semblait-il, avait eu auparavant des
doutes semblables aux miens, m'intriguèrent au plus haut point et je décidai de me
renseigner sur lui, voire de le rencontrer.
De retour en France, j'ai cherché qui était ce Laurisson. Il s'agissait d'un professeur
d'université, Robert Faurisson - orthographe phonétique rectifiée - habitant Vichy. Je
lui ai téléphoné et ce fut une explosion cérébrale. Je pensais en savoir beaucoup sur
Auschwitz. Il en savait cent fois plus que moi. Il m'affirma que le fonctionnement des
chambres à gaz homicides, tel qu'il était présenté dans sa simplicité extrême, aurait
conduit à tuer tout le monde, juifs et SS. Pour étayer ses dires, il s'appuyait sur l'étude
des chambres à gaz d'exécution qu'il avait réalisée aux États-[618] Unis. D'un côté,
selon les Mémoires du premier commandant du camp, Rudolf Höss, d'immenses
locaux où étaient asphyxiées trois mille personnes d'un coup - affirmation polonaise -
avec une technique primitive faisant fi de toute règle de sécurité, pourtant obligatoire
avec un toxique aussi puissant que l'acide cyanhydrique; d'un autre côté, des
installations sophistiquées avec un mode opératoire précis et complexe destinées à
exécuter un seul condamné. De plus, la superficie de la chambre à gaz actuelle du
crématoire 1 ne correspondait pas aux plans de la bâtisse conservés aux archives du
musée et tout gazage homicide dans cette pièce - visitée journellement par des milliers
 de touristes - était impossible, puisqu'une de ses portes comportait une ouverture
vitrée à hauteur d'homme, vitre qui ne pouvait qu'être brisée par les victimes.
Il n'y avait pas une réelle concordance de vue entre nous. Faurisson avait étudié le
fonctionnement des chambres à gaz homicides d'Auschwitz et des absurdités qu'il y
avait découvertes il concluait que les SS n'avaient jamais pu y tuer les millions de
juifs comme l'affirmaient les survivants et les Polonais. Moi, j'étais troublé par
l'arrangement des bâtiments crématoires qu'Iwaszko m'avait présentés comme
criminels et qui ne l'étaient pas. Mais, chacun, avec ses propres critiques et réflexions,
apportait de l'eau au moulin de l'autre.
S'instaura ainsi une collaboration qui dura six mois. Faurisson me forma à la critique
historique - ce que certaines personnes me reprocheront toujours. L'établissement d'un
fait exige de solides preuves. Elles peuvent se trouver dans les écrits personnels ou
témoignages des participants (SS et détenus) à condition d'être indépendants les uns
des autres, être recherchées dans la correspondance et les écrits officiels des SS, sur
les photos existantes et dans les ruines ou bâtiments restants. Or, dans cette histoire et
depuis quarante ans, avaient été privilégiés exclusivement les dires des déportés,
considérés comme sacrés. Toute parole SS n'était que mensonge, sauf si elle chargeait
encore plus leur culpabilité. Tout écrit SS était code. On ignorait la clef du codage,
mais le décryptage était connu d'avance: des termes inoffensifs devenaient comme par
enchantement «fusillades», «gazages», «chambre à gaz», etc. Tout était tourné d'une
manière négative. Les crochets pour suspendre les ringards dans une salle de fours
d'incinération ne pouvaient servir qu'à pendre des détenus. Lorsque ces derniers
prenaient une douche, ce n'était pas une douche normale, mais une douche-torture (en
alternant les flux d'eau froide et d'eau chaude) ou une douche-gaz (diffusion d'acide
cyanhydrique gazeux par les pommeaux, ce qui est impossible en physique). Cette
crainte d'une douche-gaz, le réalisateur américain Steven Spielberg l'exploite à fond -
commercialement et au mépris de la vérité historique - dans son film La liste de Schindler en présentant une installation totalement inconnue dans les camps de
concentration, la chambre à gaz pouvant doucher. SPIELBERG semble croire au
fonctionnement mixte des chambres à gaz-douches dont les pommeaux diffusent soit
du gaz, soit de l'eau. Il recycle à son profit un bobard provenant de Dachau.
L'épouillage au Zyklon-B d'une baraque de logement des détenus mesure d'hygiène
prophylactique visant à tuer les poux transmetteurs du typhus - n'était qu'une méthode
différente de tuer, car les détenus devaient délaisser leur baraque pour 24 heures ce
qui était pour eux une vraie catastrophe parce que l'épisode se situait obligatoirement
en hiver et qu'ils restaient au dehors dans un froid glacial. Malheureusement, une
épidémie de typhus ne se déclenche qu'au printemps ou en été, donc par un temps
relativement ou carrément clément. Que ce soit une impression subjective ou une
réalité, en milieu concentrationnaire, tout paraît noir et négatif à la masse des détenus.
Ainsi après guerre, des chambres à gaz d'épouillage pour les vêtements, appelées
parfois dans les rapports allemands Entwesungskammer, littéralement des «chambres
d'enlèvement de la vie», furent considérées comme des chambres à gaz homicides,
parce qu'on y ôtait la vie. Ce n'étaient pas les hommes qu'on y tuait, mais les poux.
Progressivement durant mes séances de travail avec Faurisson, j'ai appris qu'il était
engagé dans plusieurs procès. L'un d'eux portait sur ses conclusions abruptes relatives
à la chambre à gaz du K. L. Natzweiler-Struthof, en se référant aux aveux d'un des
anciens commandants du camp, le capitaine SS Josef Kramer. Ce dernier avait déclaré
avoir gazé fin août 1943 environ quatre-vingts détenus sélectionnés venant
d'Auschwitz, lesquels devaient servir à un médecin SS, le Professeur HIRT de
Strasbourg, désirant constituer une collection de crânes. Pour cela, KRAMER avait
versé de l'eau sur des «sels» et obtenu un dégagement d'acide cyanhydrique gazeux.
En chimie, un acide plus une base donne un sel et de l'eau. Mais, la réaction n'est pas
réversible. Donc, impossibilité chimique. Pour Faurisson, le SS avait raconté
n'importe quoi et rien n'était vrai. Maintenant, on pense qu'il a employé les produits
suivants: un acide cristallisé mélangé avec un cyanure de sodium ou de potassium. En
milieu anhydre, le mélange à l'apparence d'un «sel» et est stable. Si on ajoute de l'eau,
il y a réaction et dégagement d'acide cyanhydrique. Ou bien, Kramer s'est servi d'un
produit bien connu dans la lutte contre les insectes, le «cyanogaz» ou cyanure de
calcium, dégageant en trois minutes du gaz cyanhydrique après hydratation. Mais à
l'époque, personne n'avait relevé et encore moins étudié cette incohérence apparente.
A cette occasion, les archives du procès militaire de Natzweiler furent consultables.
La justice militaire française avait réalisé un album photo[620]graphique intitulé
"Camp de concentration du Struthof », comportant de nombreuses vues extérieures et
intérieures du crématoire, de la chambre à gaz et surtout les plans de ces installations.
Le plan du crématoire montre que la bâtisse se divisait en deux parties: l'une réservée
à l'incinération et l'autre permettant aux détenus de se laver en prenant une douche et
de faire épouiller leurs effets par la vapeur dans une petite cellule mitoyenne. L'eau
chaude des douches provient d'un serpentin placé au-dessus du four d'incinération ou,
quand celui-ci ne fonctionne pas, d'un chauffe-eau avec un foyer au charbon. Cette
malheureuse salle de douches a été présentée, je ne sais combien de fois, comme une
chambre à gaz homicide avec le toxique gazeux «tombant» des pommeaux et malgré
des fenêtres que les victimes auraient fait voler en éclats. Avoir retrouvé
l'aménagement du crématoire dressé par la justice en 1945 permit de découvrir un
montage beaucoup plus grave, élaboré peu avant que le camp soit ouvert au public. Le
dépôt d'urnes se situait à côte de la salle d'autopsie et la pièce où logeaient les détenus
s'occupant du four près de l'entrée. La pièce des détenus comporte un lavabo au
contraire du dépôt d'urnes, où personne ne vit. Les fonctions des pièces furent
délibérément inversées. Les urnes furent transférées dans la pièce des détenus, avec
un lavabo ne servant plus à rien. Dans le dépôt d'urnes ainsi libéré furent placés des
châlits et sa porte, de facture normale, fut équipée de gros verrous afin de faire croire
que c'était une prison d'où les médecins SS - naturellement fous - venaient chercher
des cobayes pour assouvir leur manie de vivisections. Ce montage apparaît, lorsqu'on
le sait, tellement grossier qu'on est stupéfait de la bêtise et de l'aveuglement humains.
Initialement, le révisionnisme voulait dénoncer de telles tromperies, présentées pour
avaliser les pires excès de la mémoire concentrationnaire. Une personne comme
Faurisson est née de ces outrances.
Les commentaires sur la chambre à gaz du Struthof sont pareillement absurdes ou
noircis, faute de connaissances -historiques. Souvent, le gazage homicide des 86 juifs
et juives était présenté comme ayant été effectué en versant des granules de Zyklon-B
dans l'entonnoir avec robinet pour les liquides. De nouveau, une impossibilité,
physique cette fois-ci. Après ces gazages criminels, des expériences de protection
contre un gaz toxique, le phosgène, par ingestion ou injection d'urotropine
(hexamethylènetétramine) furent pratiquées dans la chambre à gaz. Une première
série de onze expériences sur les détenus allemands volontaires, menées correctement
par un civil, le Professeur BICKENBACH, en décembre 1943, ne provoqua aucun
décès et montra que Furotropine apportait une protection relative contre les effets du
phosgène. Une expérience se déroulait comme suit: deux sujets, ayant absorbé per os
ou reçu en injection intraveineuse de Furotropine, pénétraient dans la chambre à
gaz avec une ampoule contenant quelques grammes de phosgène. La porte fermée,
l'un d'eux jetait à terre l'ampoule qui se brisait, permettant au gaz de se dégager; au
bout de vingt minutes, Bickenbach estimait la concentration restante du phosgène
dans la pièce en aspirant du gaz qui passait dans un appareil mesurant la conductibilité
électrique du flux gazeux; l'appareil de mesure était relié par un tuyau souple à un
embout métallique traversant la porte de la chambre à gaz; puis, le ventilateur, mis en
route, chassait le gaz et les détenus sortaient enfin de la pièce. En mai 1944, une
seconde série fut pratiquée par HIRT qui estimait que les essais de Bickenbach
n'étaient pas assez proches des conditions du champ de bataille. Opérant lui-même et
ne tolérant la présence de Birckenbach que pour mesurer les taux résiduels de
phosgène, FIRT utilisa des détenus tsiganes condamnés à mort en quatre groupes de
quatre sujets (deux étant des témoins de contrôle ne recevant qu'une injection d'eau
salée et deux autres étant protégés avec de 1'urotropine, l'un per os et l'autre en
intraveineuse). L'augmentation des concentrations de phosgène aboutit à la mort de
quatre des seize sujets par oedème aigu du poumon. L'embout fixe à la porte de la
chambre à gaz est présenté comme un tube d'adduction des gaz, c'est à dire pour
amener du gaz dans la pièce. Sa fonction a été inversée, passant d'un rôle extracteur à
un rôle introducteur.
Toujours dans le bâtiment de la chambre à gaz, qui était avant la guerre un restaurant
servant aux skieurs des repas bon marché, se situent trois cuves carrelées ayant servi à
conserver de la choucroute ou des pommes de terre. Ces cuves furent dites «fosses à
formol servant à la conservation des corps des victimes de la chambre à gaz».
Explication doublement erronée, car les corps, conservés dans les cuves de l'Institut
d'anatomie de Strasbourg l'étaient non dans du formol - méthode empêchant toute
manipulation ultérieure par rigidité des tissus - mais dans de l'alcool synthétique à 55
degrés.
On est atterré par l'imbécillité des explications avancées dans cette affaire qui, même
spectaculaire, n'est que mineure dans l'histoire des camps. Et lorsqu'on étudie, camp
après camp, les gazages homicides qui y furent pratiqués, émerge une accumulation
de bêtises plus sottes et débiles les unes que les autres ce qui prouve le pitoyable
niveau de la science concentrationnaire, basée exclusivement jusqu'à nos jours sur les
«sacro-saints» témoignages.

D'après vos dires sur l'état des connaissances concentrationnaires, pourquoi n'êtesvous
pas resté révisionniste?
C'est justement lors d'une séance de travail avec Faurisson sur les dossiers de la
Justice militaire française concernant le Struthof qu'a retenti à mes oreilles le
premier des signaux d'alarme qui m'ont conduit à quitter Faurisson au bout de six
mois de collaboration.
Il s'agit encore du gazage des 86 victimes juives du Struthof. A leur arrivée au K. L.
Natzweiler, elles étaient en fait 87 et venaient d'Auschwitz où elles avaient été
sélectionnées pour leurs caractéristiques morphologiques. Tout mouvement de
détenus était inscrit sur les états SS hebdomadaires des effectifs du camp. Celui du 14
 août 1943 indique la sortie pour cause de décès de trente juifs. Celui du 21 août, la
sortie de 57 juifs aussi par décès. Normalement, le motif de chaque décès, qui devait
être de plus déclaré à la Mairie de Natzweiler, était soigneusement noté, par exemple,
maladie, tentative d'évasion, pendaison, fusillade, etc. Même si la raison était
inexacte, elle devait administrativement figurer au verso du rapport d'effectif
hebdomadaire. Or, dans le cas de ces 30 et 57 (87 en tout) détenus juifs, aucune
explication n'est donnée sur la ou les raisons de ces morts soudaines et massives.
Faurisson, gêné par cette évidence, ayant remarqué que le rapport de début août
mentionnant l'entrée des 87 juifs était imprimé en caractères romains et que les deux
de sortie l'étaient en gothique, déclara froidement que les SS s'étaient trompés de ligne
et que les juifs avaient été libérés (ligne au-dessus), ce qui expliquait le défaut
d'annotation au verso... Certaines réflexions ont le pouvoir de dessiller radicalement
les yeux. Celle de Faurisson l'eut.

Le deuxième signal d'alarme vint du «rapport Fabre». Fabre était un professeur de
toxicologie de la Faculté de Pharmacie de Paris. A ce titre, il réalisa, à la demande de
la justice militaire, une recherche de cyanures sur les cadavres restants de l'Institut
d'anatomie de Strasbourg et dans la chambre à gaz du Struthof. Le résultat fut négatif
dans les deux cas. Faurisson comptait énormément sur ce rapport qui, en apparence,
abondait dans son sens. Pas de traces de cyanures, donc pas de gazages homicides.
Mais lorsqu'on reprend les données propres à ces gazages, on s'aperçoit que la
conclusion négative du rapport Fabre était hautement prévisible pour la chambre à
gaz. Sol: en béton, donc lavable. Revêtement des murs: carreaux blancs, lavables
pareillement. Nombre de gazages: probablement trois. Durée d'application de l'acide
cyanhydrique: 5 à 10 minutes. Évacuation du gaz: par un ventilateur en hauteur,
pendant environ un quart d'heure. Fabre dut racler le plafond pour prélever des
échantillons. Mais retrouver des cyanures avec une si faible utilisation et un temps de
contact aussi bref est illusoire. Malheureusement, le rapport ne figurait pas dans les
pièces du procès et reste toujours introuvable. Pour Faurisson, c'était une preuve
supplémentaire qu'on «lui dissimulait un fait capital». Pour moi, qui suis pharmacien
de métier, ce fut la deuxième fois que j'en vins à douter de la validité des
arguments de Faurisson.

Avez-vous alors quitté Faurisson?
Non. Même si je commençais à comprendre que Faurisson avait, lui aussi, ses limites,
mes doutes concernant les crématoires n'avaient pas été éclaircis. Faurisson amplifiait
mes interrogations initiales, sans y apporter de réponses convaincantes. Si je voulais
voir clair dans cette affaire, il fallait que je m'y investisse personnellement et non
dépendre des dires d'un monsieur qui dérapait parfois. C'est la question d'argent qui
dicta les rôles. Contrairement aux déclarations hystériques du président de la LICRA,
Jean-Pierre BLOCH, affirmant que la Libye finançait les révisionnistes, ces derniers
n'avaient pas le sou. Or le dossier de Faurisson relatif au K. L. Auschwitz était assez
maigre et un complément de documentation lui était nécessaire. Ce qui signifiait de
nouvelles études au musée d'Oswiecim. Faurisson ne pouvait s'y rendre, craignant un
refus de consultation. De plus, ses seules ressources provenaient de son salaire versé
par l'Éducation nationale. N'étant pas «indésirable» à Oswiecim et étant le seul à
pouvoir payer mes déplacements, c'est moi qui repartis en Pologne en août 1980.

En arrivant aux archives du musée, je me trouvais dans une position délicate. J'étais
censé n'en savoir pas plus que lors de ma dernière visite et ce n'était plus vrai. J'avais
engrangé un acquis révisionniste important et ma vision des crématoires comme
parfaits instruments de mort s'était modifiée. J'ai voulu vérifier la thèse de Faurisson
et j'ai cru à sa validité deux jours. C'est-à-dire que, face aux ruines des crématoires de
Birkenau et aux archives SS du musée, la thèse de Faurisson sur l'impossibilité des
gazages homicides massifs n'a tenu que deux jours.
Connaissant parfaitement le plan du sous-sol du crématoire II, il me fut facile d'en
retrouver l'arrangement dans les ruines restantes. Je découvris au niveau de sa «cave à
cadavres-1», la dite chambre à gaz, des ouvertures ne figurant pas sur le plan. Je suis
descendu dans l'une d'elles et vis un conduit séparé avec clapet qui semblait
communiquer avec le trajet de reprise d'air de la pièce. Même constatation pour les
autres ouvertures. La chambre à gaz m'a paru alors plus trouée que du gruyère et
incapable, faute d'herméticité, d'assurer le moindre gazage homicide à l'acide
cyanhydrique. Là, j'ai cru que Faurisson avait vu juste.
Le lendemain matin, ayant soigneusement répertorié mes arguments dans la nuit, j'ai
attaqué Iwaszko sur le plan Bauleitung n' 932. Tout y est passé: la double porte inepte
avec un sens d'ouverture inverse de ce qu'il aurait dû être; une aération haute et une
désaération basse alors que, pour une chambre à gaz, le contraire était impératif;
l'évacuation des eaux usées chargées de gaz prussique communiquant directement
avec les WC des médecins SS au rez-de-chaussée; le manque d'ouvertures pour le
versement du Zyklon-B; l'avancée de la glissière à cadavres gênant le passage des
victimes du vestiaire à la chambre à gaz; l'absence sur le plan de l'escalier d'accès au
vestiaire, pourtant visible dans les ruines et manifestement ajouté après; enfin, la
présence de trois ou quatre ouvertures autour de la chambre à gaz non mentionnées
sur le plan que j'avais découvertes. En conclusion, affirmer que la «cave à cadavres-
1» du crématoire Il était une chambre à gaz homicide ne tenait pas. Là, Iwaszko fut
grandiose. Il ne répondit pas, sortit de la salle de consultation des documents où nous
nous trouvions, me laissant savourer ma victoire, et revint avec UN plan SS, le n'
1300 du 18 juin 1942, intitulé "Krematorium-Entwässerung/Crématoire [II]-
Évacuation des eaux». De ma vie, je n'ai jamais reçu une telle gifle - au figuré bien
sûr.
Le «1300» répondait en tout à mes remarques concernant le drainage du crématoire-
II. L'évacuation des eaux usées avait été modifiée par les SS de la Bauleitung en juin
1942: le conduit menant dans une fosse de décantation reliée aux WC de la salle
d'autopsie avait été obturé. Les eaux usées de la «cave à cadavres-1» sortaient à part,
passant par le puisard dans lequel j'étais descendu et rattrapaient le conduit principal
venant du crématoire, qui se dirigeait vers un lointain fossé d'évacuation. Grâce à
cette nouvelle disposition évacuant séparément les eaux chargées de toxique, les SS
pouvaient gazer en toute sécurité. J'ai fait comprendre à Iwaszko que, si son plan
répondait parfaitement à mes critiques sur le drainage du crématoire, en levant des
impossibilités physiques de taille, il en restait d'autres inexpliquées. Nous avons passé
un accord. Pour lever mes doutes, il me fournirait à étudier tous les plans des
crématoires dessinés par la Bauleitung SS d'Auschwitz. Quand je serais convaincu, je
devrais le lui dire. Iwaszko m'a offert ces facilités parce que j'ai su dire que je m'étais
trompé sur le drainage et que je n'étais pas de mauvaise foi.

A ce moment-là, je pensais que la thèse de Faurisson était encore à moitié valable et
que l'étude intensive des plans SS me permettrait de conclure définitivement, dans un
sens ou dans l'autre. Je comptais «boucler» cette recherche rapidement, en un ou deux
voyages supplémentaires en Pologne. Je sous-estimais gravement des données et des
facteurs qui m'échappaient. D'abord la masse d'archives à étudier. J'ignorais qu'une
bonne dizaine d'entreprises civiles avaient participé à l'édification de ces bâtisses, que
deux d'entre d'elles, la Huta de Kattowitz et la Konrad Segnitz de Beuthen, avaient
dessiné leurs propres plans et qu'existaient [625] en sus des dossiers d'avancement des
chantiers rédigés par les contremaîtres de ces entreprises. J'ignorais le rôle essentiel de
la firme Topf et fils d'Erfurt, conceptrice des fours d'incinération et responsable de
leurs montages. Je pensais que les deux plans du crématoire-I publiés par Faurisson
étaient les seuls. C'était faux. Donc, si je voulais obtenir un résultat sûr et indiscutable,
je devais étudier tous les documents conservés au musée se rapportant aux
crématoires d'Auschwitz. Se posait aussi le problème de la duplication des documents.
Photocopier est simple comme bonjour à l'Ouest. Mais dans les républiques
populaires d'alors, les photocopieuses étaient rares, souvent en panne et pratiquement
inutilisables. Je dus passer par la photographie des pièces sélectionnées. Comme le
musée d'Oswiecim ne disposait que d'un laboratoire photo dans lequel travaillaient
trois employées dont deux étaient souvent absentes, se procurer des copies ne fut pas
une mince affaire et s'étala sur des mois.
Cette étude, beaucoup plus longue que prévue, a nécessité une vingtaine de
déplacements en Pologne et a duré de nombreuses années. J'ai suivi une sorte
d'enseignement universitaire libre, avec Iwaszko comme professeur au départ, puis
tout seul ensuite quand j'ai commencé à dégager des résultats qui étaient en
contradiction avec l'histoire communiste du camp. Peu à peu, ma ténacité dans cette
recherche a payé. Les portes se sont ouvertes progressivement. Iwaszko répondait à
toutes mes demandes de consultations - mêmes injustifiées - de documents. Si je
voulais visionner un film sur le sujet, une salle de projection était ouverte pour moi
seul. Iwaszko a eu beaucoup de mal à saisir que je vivais à un rythme occidental et
que lorsque je perdais du temps, je perdais aussi de l'argent, car ces voyages me
coûtaient cher. Puis les Polonais s'habituèrent à mes passages exigeants et bruyants.
Mes derniers séjours aux Archives créaient un tourbillon de demandes de dossiers, de
photocopies (enfin!) urgentes, de clichés de plans à réaliser immédiatement. J'étais
devenu - aux yeux des historiens du musée d'Oswiecim - le meilleur spécialiste de
cette question.

Quels ont été vos premiers résultats et êtes-vous arrivé à une conclusion?
Les premiers résultats obtenus furent de deux sortes. Concernant l'histoire du camp, la
démonstration que les crématoires avaient été projetés comme des installations
sanitaires normales, puis aménagés en centres de liquidation des «juifs inaptes au
travail», c'est-à-dire les femmes, les enfants et les vieillards. Cela peut paraître ne rien
changer au fait de la tuerie des juifs, mais la question cruciale était et est toujours:
quand l'ordre a-t-il été donné? Faute d'un document écrit, on s'en rapporte aux dires
des SS. Selon le commandant Höss, à l'été 1941. Or, la transformation criminelle
des crématoires fut entreprise fin novembre 1942. Cet écart d'un an ne peut
s'expliquer que si Höss s'est trompé de date. Affirmer que Höss reçut l'ordre de
liquidation début juin 1942 implique que tous les livres écrits depuis cinquante ans sur
cette question et indiquant comme prise de décision du massacre l'été 1941 sont
inexacts et à revoir. Tel était le premier résultat d'une simple étude des dossiers de la
Bauleitung SS d'Auschwitz et qui aurait dû être effectuée depuis longtemps. Quant à
la thèse de Faurisson, ce fut une exécution. Lorsque j'ai commencé à consulter les
plans et les dossiers de construction des crématoires, de nombreuses difficultés
surgirent. L'écriture de quelques plans était en gothique manuscrit que je ne lisais pas.
Je dus décomposer les mots lettre par lettre. J'ai abordé les dossiers de construction
avec un allemand scolaire, sans plus. Je travaillais en recherchant des mots clés:
«Gas/gaz, Gaskammer/chambre à gaz, Gastür/porte à gaz, Gasdichte Tür/porte
étanche au gaz, Ofen/four, Einäscherungsofen/four d'incinération,
Verbrennungsofen/four de crémation, Einäscherungsanlage/installation d'incinération,
Krematorium/ crématoire». Dès que j'en trouvais un, je cherchais à saisir dans quel
contexte il était employé. Souvent, j'appelais Iwaszko pour m'aider à déchiffrer ou à
comprendre. Ces dossiers n'avaient pas été étudiés par les historiens polonais parce
que, étant manuscrits, ils étaient difficilement lisibles. C'est sous le crayon d'un
contremaître de l'entreprise civile Riedel et fils de Bielitz que j'ai trouvé les deux
premières «traces criminelles» concernant le crématoire IV. Ce que je désigne de
«traces criminelles» découle de l'aménagement d'un crématoire normal, destiné à
incinérer les morts et comprenant essentiellement une ou des morgues, une salle
d'autopsie légalement obligatoire, une salle du ou des fours et une cokerie, en un
crématoire anormal car comportant une chambre à gaz homicide. Cet aménagement
ou cette transformation nécessite des équipements particuliers dont on retrouve
mention dans la correspondance SS ou les journaux de chantier des entreprises civiles.
Une définition plus juste serait «traces d'aménagement criminelles». La recherche de
telles «traces» n'est pas envisageable si les crématoires sont considérés comme étant
criminels dès le début, ainsi que l'ont cru les historiens polonais pendant quarante ans.
Dans le dossier de construction du crématoire IV par la RIEDEL ET FILS, figuraient
sous la rubrique «Travaux à effectuer» les indications suivantes: le 28 février 1943,
«Poser fenêtres étanches au gaz» et le 2 mars, «... sol à bétonner dans chambre à gaz».
Plus tard, dans le dossier de la menuiserie du camp, j'ai découvert une commande de
«12 portes étanches au gaz d'environ 30/40 cm» - en fait des fenêtres vu les
dimensions - datée du 13 février et livrée le 26. Les dates concordaient
parfaitement. Enfin, dans une pièce du crématoire 1, se trouvent exposées trois
de ces fenêtres étanches au gaz, retrouvées dans les gravats du crématoire IV après
son dynamitage par les SS le 22 janvier 1945. C'était par ces fenêtres étanches,
réparties à raison de 6 par crématoire, que les SS versaient le Zyklon-B dans les
chambres à gaz des crématoires IV et V.

Avez-vous informé Faurisson de vos découvertes?
Rentré en France en septembre, je n'avais rien de concret à montrer à Faurisson, sauf
lui faire part qu'existaient des pièces qui contredisaient ses dires, pièces que les parties
adverses étaient en train de lui communiquer, malheureusement noyées dans un fatras
de témoignages inexploitables parce que sans critique historique. Je suis retourné
deux fois assez longuement au musée d'Oswiecim où j'ai commencé à étudier
sérieusement les dossiers. Durant ces séjours, des discussions historiques tendues
m'opposèrent à Iwaszko, parce que mes doutes persistaient. Et puis, je suis tombé sur
les premières «traces d'aménagement criminelles» du crématoire IV, que personne
n'avait vues depuis 1945. De retour, j'ai averti Faurisson de mes trouvailles. Comme
tous les autres auparavant, cet entretien crucial se déroula le 27 novembre au domicile

parisien de Pierre Guillaume, l'éditeur de Faurisson, où logeait ce dernier lors de ses
déplacements à Paris. Ne possédant pas de photos de ces pièces, je leur ai demandé de
me croire sur parole et leur ai dit qu'il traînait beaucoup trop de traces et d'anomalies
«gazeuses» dans les dossiers du musée d'Oswiecim pour continuer à prétendre que les
chambres à gaz homicides d'Auschwitz-Birkenau n'en étaient pas.

Quelles ont été leurs réactions?
Faurisson déclara qu'il ne pourrait se prononcer que lorsqu'il verrait les documents en
question, ce qui était normal. Même attitude pour Guillaume qui suivait aveuglément
Faurisson.

Ont-ils pris en compte ce que vous rapportiez du musée d'Auschwitz?
Non, ils ne pouvaient plus. J'ai compris que, quel que soit le résultat de mes
recherches, Faurisson et Guillaume, étaient trop engagés dans les divers procès en
cours pour faire machine arrière. A partir de ce moment-là, je devins gênant.
Poursuivre l'étude des crématoires signifiait travailler contre eux. Faurisson biaisa. Il
orienta mes investigations, avec mon accord et afin de ne lui pas faire de tort, vers les
installations d'épouillage des effets des détenus au camp d'Auschwitz afin de
démontrer que, si l'acide cyanhydrique avait été utilisé dans certaines pièces des
crématoires, c'était afin de tuer les poux des vêtements et non les hommes. [628]
L'idée était astucieuse, mais impuissante contre la réalité historique. Pourtant, ce
travail était nécessaire, voire obligatoire, et Faurisson aurait dû le mener lui-même,
avant de conclure. Il se serait aperçu qu'on pouvait employer le gaz cyanhydrique sans
difficulté dans des installations très sommaires, à condition qu'elles soient équipées de
ventilateurs pour expulser le toxique.

Furent ainsi répertoriées toutes les «
 Entlausungsanlagen/installations d'épouillage» du
camp. Au camp central d'Auschwitz, existèrent trois chambres à gaz d'épouillage au
Zyklon-B: une au rez-de-chaussée du Block 1 et deux au premier étage du Block 3. Y
fut aussi projetée à proximité du bâtiment de réception des détenus l'installation d'une
batterie de 19 cellules d'épouillage au Zyklon-B de type «DEGESCH», la firme
diffusant ce produit. Au «Canada I», l'entrepôt de stockage des effets récupérés sur les
juifs, une autre. A Birkenau, encore deux dans les bâtiments BW 5a et 5b. Bien plus
tard, dans les pièces de la Bauleitung SS conservées aux Archives du KGB à Moscou,
j'en découvrirai de nouvelles, destinées à l'épouillage des vêtements des ouvriers
civils du complexe concentrationnaire. Sans compter les
«Entwesungsanlagen/installations de destruction des parasites» fonctionnant à l'air
chaud, au Zentral Sauna, au camp des Tsiganes et dans le secteur dit «Mexico», les
trois situées à Birkenau. Sans oublier les autoclaves marchant à la vapeur: un dans le
Block 26 du camp central et cinq à Birkenau. Faurisson utilisa ultérieurement cette
étude pour susciter le «Rapport Leuchter». De mon côté, elle me servit d'abord à
établir que 95 % du Zyklon-B livré à Auschwitz était employé à l'épouillage et que
seuls 5 % maximum servait à asphyxier les juifs, au contraire des dires de Raul
HILBERG, et ensuite à prouver qu'a Maïdanek, des pièces présentées par les Polonais
comme des chambres à gaz homicides n'étaient que des chambres d'épouillage. Le
comique grinçant de cette affaire est que l'idée de Faurisson se vérifia à Maïdanek,
mais non à Auschwitz.

Une notion essentielle se dégagea de ce travail: l'aménagement constant des
installations ou leur transformation en fonction des besoins ou des ordres supérieurs.
Ainsi, l'épouillage au gaz cyanhydrique fut interdit par Berlin dès 1940 et devait être
remplacé par l'air chaud. Seulement, le Zyklon-B était rapide et efficace, utilisable
dans n'importe quelle pièce qu'on étanchéifiait et équipait d'un ou des ventilateurs. Les
pièces à air chaud nécessitaient un matériel plus complexe et plus coûteux. Les SS
préférèrent s'en tenir à une méthode sûre, donc à l'acide cyanhydrique. Par exemple à
Birkenau, la chambre à gaz d'épouillage du bâtiment BW 5a, après avoir fonctionné
au Zyklon-B, fut aménagée pour l'emploi de l'air chaud, au contraire de celle du BW
5b qui resta dans son état premier. A Auschwitz, les 19 cellules DEGESCH du
bâtiment de réception ne reçurent jamais leur équipement de diffusion du Zyklon-B.
On pensa y utiliser un autre gaz, l'areginal (du formiate de méthyle), fourni par l'I.G.-
Farben, mais ce projet fut aussi abandonné, toujours faute de matériel adéquat. En
dernier lieu, une partie de l'installation, construite mais inutilisée, servit de station
d'épouillage expérimentale avec deux postes où était appliqué un champ d'ondes
ultracourtes, mis au point par la firme Siemens de Berlin. A Maïdanek, le bloc
d'épouillage subit trois modifications successives: d'abord, il fonctionna à l'air chaud,
puis au gaz cyanhydrique et enfin, il fut aménagé pour tuer des inaptes au travail avec
de l'oxyde de carbone. Rien n'était fixe et chaque bâtiment évoluait en fonction du
rôle souhaité selon les circonstances. Cette évolution structurelle, que j'avais déjà
rencontrée au niveau des crématoires, se vérifiait pour d'autres ensembles et devint le
pivot principal de mes conclusions ultérieures.
Quand avez-vous quitté Faurisson?
Tout en menant cette étude «dérivatrice», je continuais simultanément le travail sur
les plans et les dossiers des crématoires d'Auschwitz-Birkenau. Je relevais de plus en
plus de «traces d'aménagement criminelles» et le comble est qu'elles étaient nouvelles
et inconnues de tous, aussi bien des associations d'anciens déportés qui attaquaient
Faurisson que de ce dernier. Ces «bavures criminelles» des SS et des civils
commençaient à peser fortement sur mes relations avec le dit Professeur, lesquelles
s'étaient distendues à partir de décembre 1980. Un jour d'avril 1981, une crise se
produisit entre lui et moi parce que nos divergences d'interprétation étaient devenues
abyssales et inconciliables. Faurisson prétend qu'il m'a mis dehors, manu militari. Il y
eut séparation, point final. Je lui laissais d'ailleurs gracieusement dix-sept plans
explicatifs des crématoires que j'avais dessinés pour l'aider à comprendre les
problèmes techniques et qu'il considérait comme «magistraux». Il les utilisa après
dans plusieurs conférences. Que cette rupture lui ait été catastrophique et qu'il en ait
été furieux, je le conçois, mais pour moi, sa thèse ne tenant plus, je ne pouvais plus
continuer à travailler pour lui.

Durant votre passage chez les révisionnistes, lesquels avez-vous connus?
J'ai connu assez peu de révisionnistes, trois exactement en dehors de Faurisson. Éric
Delcroix, l'avocat de Faurisson, politiquement de droite, qui soutient et défend encore
fanatiquement les délires d'inexistence de son client. Serge Thion que j'ai dû
rencontrer une ou deux fois en comprenant immédiatement rien qu'à le voir, qu'il
n'était pas de mon bord - politique - et que nous n'avions rien à nous dire, ce qui
n'a pas empêché, à la suite de la publication de mon livre «Les crématoires
d'Auschwitz» aux CNRS-Éditions, de nous parler au téléphone, mais toujours pour ne
rien dire. Et enfin Pierre Guillaume, connaissance incontournable puisque toutes les
réunions de ce petit monde se tenaient chez lui. Guillaume est un ancien «Brution»,
appellation de ceux qui sont passés au Prytanée Militaire de la Flèche dont je suis.
Étant d'extrême-gauche, c'est au nom de fumeuses théories marxistes qu'il a
découvert, aidé et publié Faurisson. Guillaume n'a jamais vérifié le travail du
«Professeur», ce qui le plaçait dans une situation de sujétion intolérable. Ayant gardé
un contact épisodique avec lui après ma rupture avec Faurisson, jamais, au cours de
nos entretiens, il ne put contrer mes affirmations en face. Puis, par derrière, dans des
écrits méprisants, il se gaussait de mes travaux, sans avancer la moindre preuve à
l'appui de ses railleries.

Qu'avez-vous fait après cette rupture avec Faurisson?
A l'époque, je perdais beaucoup. En particulier, toute sa documentation, du moins le
pensai-je. Quand je parle de la documentation de Faurisson, je devrai dire plus
exactement celle du musée d'Oswiecim. Les quatre plans Bauleitung des crématoires
(deux du 1, un du Il et un du IV) qu'il possédait venaient de là. Les photos, aussi. La
correspondance des SS avait été fournie par les parties adverses et généreusement
traduite entièrement en français. Ses armes, il les prenait chez l'adversaire. Faurisson
vivait sur les autres et attendait d'eux qu'ils prouvassent l'infaillibilité de son
hypothèse. Payé par l'Éducation nationale à ne rien faire, adulé mondialement comme
«pape» du révisionnisme, il avait déclaré à la défunte revue «Zéro» que les chambres
à gaz étaient «magiques» et permettaient de vivre confortablement. Depuis 1980, il
exploite de naïfs idéalistes, tels Pierre Guillaume, Carlo Mattogno, Henri Roques,
Ernst Zündel, Fred Leuchter, John C. Ball, David Irving, moi-même, etc., dont il a
parfois brisé la carrière en les entraînant dans «la plus grande aventure intellectuelle
de cette fin de siècle».
Pour reconstituer le fonds de documents sur lesquels j'avais travaillé, je retournai au
musée d'Oswiecim, exposai la situation à Iwaszko, le prévins que je n'étais toujours
pas convaincu et lui demandai son aide. En peu de temps, j'ai dépassé le niveau
documentaire faurissonien. Afin que mes résultats soient incontestables, j'ai dû
effectuer une vingtaine de séjours en Pologne. Au début, Iwaszko ne comprenait pas
mon obstination à rassembler toutes les pièces concernant les crématoires et les
installations de gazage, d'épouillage et homicides. Les employés du musée
travaillaient alors sur les historiques des multiples camps annexes du complexe
concentrationnaire et cette question centrale, mais ancienne pour eux, ne les
concernait plus. Elle avait été menée à la fin de la guerre par le juge polonais Jan
Sehn, qui fut chargé d'instruire le dossier d'accusation de l'ex-commandant du camp,
Rudolf Höss. Mort dans les années soixante-dix, il ne l'avait pas exploité à fond
comme je m'en rendis compte, vu que je suivais ses traces. J'ai simplement continué le
travail de cet homme dont je respecte la mémoire.
Cette recherche me fut extraordinairement intéressante, bonifiante et m'a probablement transformé.
Un camarade l'a comparé à une initiation maçonnique. J'ai eu à escalader un pic
montagneux. A mesure que l'ascension progresse, la vue s'améliore. Ainsi, j'ai pu
juger le combat entre Faurisson et Georges Wellers, directeur du CDJC (Centre de
Documentation juive Contemporaine) de Paris. Wellers se parait d'un titre honoraire
de la Faculté de médecine de Paris et se drapait dans sa dignité d'ancien déporté racial.
Faurisson se targuait de sa suffisance infaillible de professeur et de l'auréole du martyr
de la Vérité. Leur niveau de connaissances étant égal, ils se battaient à coup d'articles
autoritaires et cinglants, sans que l'un puisse l'emporter sur l'autre, parce que leurs
arguments étaient pitoyables, faute d'avoir acquis l'ensemble des données pour
trancher. A une certaine hauteur, on rencontre de moins en moins de monde et,
soudain, c'est la solitude complète. J'avoue que ce fut très dur. Je fus bientôt obligé
pour parler, banalement parler, de mes problèmes de me rendre au musée d'Oswiecim
pour rencontrer Iwaszko. Et même cela devint difficile, car le domaine que j'explorais
n'était pas la spécialité d'Iwasko qui portait sur les conditions de vie des détenus dans
l'ancien camp.
Les évidentes modifications successives des bâtiments crématoires, en fonction des
besoins des SS, expliquaient mes interrogations et levaient mes doutes initiaux. Bien
sûr, ce ne fut pas soudain, comme une révélation céleste, mais progressif, au fur et à
mesure que je m'enfonçais dans la lecture de tous les écrits et plans de la Bauleitung
SS et des entreprises civiles allemandes, ce que personne n'avait réalisée. De plus,
qu'une étude technique des crématoires puisse révéler de sérieuses erreurs dans
l'histoire officielle d'Auschwitz, établie et diffusée depuis quarante ans par des
historiens renommés, ne me serait jamais venu à l'esprit. Voici une retombée
immédiate, mais mineure, de l'étude des crématoires relative au livre du Dr Miklos
Nyiszli, Médecin à Auschwitz. Il raconte que, dans le crématoire Il ou il vécut sept
mois, quatre ascenseurs montaient les corps des gazés de la chambre à gaz souterraine
à la salle des fours au rez-de-chaussée. Huit plans de la Bauleitung, ainsi que les
ruines, n'en montrent qu'un. Médecin légiste, donc précis et rigoureux, il ajoute
qu'on entassait 3.000 personnes dans 210 m2, disposition irréaliste. Nyiszli est mort
dans les années cinquante et son manuscrit en hongrois n'a pas été retrouvé. Par
contre, existent de multiples traductions de son récit, propagé dans le monde entier.
Les documents allemands sur le massacre des juifs sont rares. Berlin ayant été
bombardé, les offices centraux SS y siégeant ont vu leurs papiers flamber. La masse
des documents décisifs, dits «centraux», portant les ordres, a été anéantie. Au
contraire des documents de certains camps de concentration, qui furent saisis à la
libération, et dits «périphériques». On cherche donc à reconstituer les ordres
«centraux» à partir des pièces «périphériques», quelles qu'elles soient. D'où
l'importance d'établir une chronologie de la construction et de la transformation
criminelle des crématoires de Birkenau, permettant de compenser le manque de
documents «centraux». Je n'ai pu vraiment ébranler la chronologie du massacre des
juifs à Auschwitz qu'après avoir consulté la totalité des documents de la Bauleitung
SS d'Auschwitz, c'est à dire après avoir réuni au fonds des archives d'Oswiecim celui
des archives du KGB moscovites.

Comment avez-vous été accepté ensuite comme historien?
Jusqu'à la publication de mon premier ouvrage important,
Auschwitz: Technique et fonctionnement des chambres à gaz , je fus appuyé par trois personnes.
Iwaszko
 m'ayant prié de porter un livre à un ancien détenu français de Monowitz (ou
Auschwitz III), Jacques Zybermine, celui-ci me mit en contact avec Georges Wellers.
Ce dernier me demanda un échantillon de mon savoir. Les documents portant sur les
crématoires IV et V de Birkenau étant relativement peu nombreux, je rédigeai sur ces
bâtiments un texte d'une vingtaine de pages et le lui donnai. Puis, j'attendis sa
réaction. Il n'en eut pas. Grâce à de nouveaux documents provenant de mes voyages
répétés à Oswiecim, j'étoffai mon écrit initial qui fut porté à quarante pages, que je
communiquai à Wellers. Toujours pas de réaction. Wellers bloquait mon travail, parce
que les pièces allemandes que j'utilisais lui étaient totalement inconnues et que ces
données originales dérangeaient son ordonnance personnelle de cette histoire. Le peu
que j'ai fourni sur les crématoires IV et V, par rapport à ce que j'avais accumulé sur
les II et III, était déjà beaucoup trop révolutionnaire pour lui. Lors d'un entretien en
tête à tête, nous avons discuté violemment sur une photo SS de mai-juin 1944
montrant le crématoire IV. Visible de tous alors, il n'était pas «camouflé» comme
WELLERS le pensait et comme le montrait une photo aérienne ultérieure, entouré
d'une haie. Il refusait de se rendre à l'évi[633]dence et n'acceptait pas le fait. Un
aveuglement aussi délibéré, aussi stupide, me stupéfia. Je découvris que, comme
Faurisson, Wellers avait pareillement des limites bornées et infranchissables. Mes
travaux l'intéressaient tant qu'ils confortaient ses idées, mais il était hors de question
de publier ce qui le contrariait.

Je fus très dérouté par l'attitude irrationnelle de Wellers et ne savais que faire. Ayant
été impressionné par Un Eichmann de papier, article paru dans la revue Esprit et
dénonçant Faurisson, je téléphonai à l'auteur, Pierre Vidal-Naquet et lui déclarai que
s'il désirait un second mémoire d'Auschwitz, j'étais en train de le constituer. Je lui
remis un livret d'environ 80 pages, toujours sur les crématoires IV et V. Vidal-Naquet
estima valable ma démonstration sur l'évolution des bâtiments, déplora avec justesse
que mon écrit fût mal organisé et donc impubliable, mais conclut que les documents
produits étaient trop importants pour rester ignorés. Il trouva une solution en me
«propulsant» comme intervenant au colloque L'Allemagne nazie et l'extermination des juifs qui se tint à la Sorbonne du 29 juin au 2 juillet 1982.
Dans l'après-midi du 30
 juin, j'y parlai exactement 18 minutes en projetant 36 diapositives de documents
inconnus de cette docte assemblée. Vidal-Naquet me félicita - et pour cause, étant le
seul à avoir produit du matériel historique neuf - quoiqu'il ait pensé qu'il existait une
chance sur mille pour que je tourne casaque au dernier moment et défende les thèses
révisionnistes. Voyant l'effet obtenu par mon intervention, Wellers qui participait au
colloque, assis juste à côté de moi, m'annonça que, désormais, l'impression de mes
résultats était urgentissime. En septembre, Le Monde juif, la revue du CDJC, publiait
un article sur les crématoires IV et V de Birkenau. Dans l'introduction, Wellers, forcé
de présenter l'article et de reconnaître l'originalité de mon travail, y condamnait ma
théorie sur l'évolution de l'arrangement intérieur. En vain d'ailleurs, puisque les
documents la confirmaient. Et j'ai poursuivi, seul, mes recherches.
C'est au musée d'Oswiecim que me fut présenté tout à fait par hasard
L'album d'Auschwitz diffusé par Serge Klarsfeld dont j'avais entendu parler en tant que
«chasseur de nazis». Je n'accepte pas la démarche qui consiste à traîner devant les
tribunaux des vieillards gâteux parce qu'ils ont participé ou furent les auteurs de
«crimes contre l'humanité», définition hautement aléatoire de certaines actions
générées par la guerre. Je ne crois pas à la valeur éducative des procès, surtout que les
témoignages, les débats et parfois des pièces produites ne sont ensuite plus
consultables pendant cinquante ou cent ans. L'histoire se construit sans haine, avec
lucidité, à partir des documents restants, permettant de contrôler les dires des
participants. Ayant appris par le musée d'Oswiecim que Klarsfeld vivait à Paris et
malgré mes réserves sur son activité qui devinrent de plus en plus fortes au fil des ans,
je lui téléphonai pour me procurer L'album d'Auschwitz. Je croyais être un parfait
inconnu pour lui. J'avais oublié ma publication dans Le Monde juif. Il me remit un
exemplaire de L'album que j'ai commencé immédiatement à étudier.

C'était une
 reproduction d'un album photographique réalisé par un SS lors du transfert des juifs
de Hongrie à Auschwitz en mai et juin 1944. Une partie, sélectionnée pour travailler
dans les usines d'armement, fut envoyée un peu partout en Allemagne et le reste,
liquidé. Ce fut l'ultime fois où les crématoires II, III et V, ainsi que l'installation dite
Bunker 2, fonctionnèrent simultanément. Le dernier grand massacre d'Auschwitz. Le
ou les photographes SS avaient enregistré l'arrivée de ces gens, leur descente des
wagons, leur séparation en deux colonnes - hommes d'un côté et femmes et enfants de
l'autre, leur sélection par les médecins SS pour le travail ou la mort, le départ des
inaptes vers les crématoires - les II et V à cette époque, et leur entrée sur le terrain de
ces bâtisses. Trois photos étaient importantes car elles montraient en arrière plan des
victimes les crématoires III et IV. Mais le «reportage» SS s'arrêtait devant les
crématoires et l'ultime étape des femmes, enfants et vieillards condamnés ne fut pas
photographiée. Elle fut dessinée après la guerre par un membre du
Sonderkommando du crématoire III, David OLERE.
L'album que diffusait Klarsfeld était un document brut, sans légendes. J'ai recherché
les séquences prises par les SS et ai reclassé l'ensemble en les situant à Birkenau. Ce
travail fut publié par Le Seuil en 1983. En 1985, Klarsfeld me fit réaliser une courte
étude sur les gazages homicides du camp de Natzweiler-Struthof, que sa fondation
publia. En octobre 1989, la somme de mes recherches sur Auschwitz-Birkenau fut
publiée en anglais, toujours par la fondation Klarsfeld, sous le titre
Auschwitz: Technique and Operation of the Gas Chambers .Ce «pavé» ne fut tiré qu'à mille
exemplaires, mais suffit pour asseoir ma réputation parmi les historiens spécialistes du
sujet. Ensuite, j'ai rédigé une réfutation du fameux rapport Leuchter, toujours publiée
en anglais. L'ouverture des archives du KGB à Moscou et la redécouverte des archives
de la Bauleitung SS d'Auschwitz, saisies par les Soviétiques en 1945, me permirent
d'effectuer une synthèse complète de cette histoire que publièrent fin 1993 les
Éditions du CNRS sous le titre Les crématoires d'Auschwitz.
Pensez-vous que l'on puisse attribuer une connotation politique au révisionnisme?
Pour de nombreuses personnes, le révisionnisme est l'apanage de l'extrêmedroite.
De nos jours. Lorsque j'ai rencontré Faurisson en 1980, l'extrême-gauche
contestait la présentation officielle de l'univers concentrationnaire et la réalité des
chambres à gaz homicides, acceptées alors bon gré mal gré par l'extrême-droite. Puis
devant le succès certain de ces «mises en doute», cette dernière a récupéré à son
compte ce cadeau inespéré qui l'exemptait d'une tare majeure.
En fait, tout dépend du champ d'application du mot «révisionnisme». Le premier
révisionnisme contemporain portait sur la responsabilité du déclenchement de la
première guerre mondiale. Les Alliés accusaient les Centraux d'avoir déstabilisé le
mécanisme des alliances européennes, devenu incontrôlable après la mobilisation
austro-hongroise. En 1919 à Versailles, les Allemands furent voués à la vindicte
universelle et chargés de toutes les turpitudes imaginables, inventées par la
propagande de guerre alliée. Le véritable responsable de cette inutile boucherie était
la Russie, appuyée et financée par la France, et qui, en mobilisant son armée la
première, provoqua par là en quatre ans la mort de huit millions d'hommes. Bien que
le fait soit patent et ait été connu dans les années trente, comment le faire accepter aux
«poilus» sacrifiés en vain et pour qui le «boche» demeurait l'ennemi héréditaire?

Après la seconde guerre mondiale, le même problème de la responsabilité se reposera,
mais une véritable réponse ne sera possible et donnée que lorsque tous les acteurs du
conflit auront disparu. La question principale du révisionnisme actuel - qui porte la
responsabilité de l'embrasement? - n'étant pas encore traitable, restaient les «locales».
D'abord, les bases juridiques du procès de Nuremberg furent attaquées. Sa procédure
expéditive, la rétroactivité des accusations et l'acceptation de charges sans preuves,
furent dénoncées en France par Maurice Bardèche qui récidiva avec les procès dits de
Dachau où le personnel américain avait torturé les SS jugés. Ensuite et toujours en
France, les conditions de vie dans les camps de concentration furent abordées par un
ancien détenu, Paul Rassinier. Le rôle de la Häftlingsführung [organisation des camps
par les détenus], aux mains des communistes qui s'en glorifiaient pour le «bien» qu'ils
y avaient fait, fut présenté par Rassinier comme étant nuisible, parfois mortel, pour les
détenus non communistes, c'est-à-dire la grande majorité des déportés. A l'époque, on
croyait que chaque camp de concentration possédait sa propre chambre à gaz
homicide pour liquider les juifs, les communistes et les détenus au stade «musulman».
Rassinier, qui avait été prisonnier à Buchenwald, affirma qu'il n'en existait pas dans ce
camp et, pareillement à Dora, ce qui est historiquement exact. Ce fut un beau tollé et
il fut accusé publiquement en novembre 1950 de nier la présence de chambres à
gaz dans les camps de concentration, généralisation qu'il n'avait jamais faite. Dénoncé
avec hargne et fanatisme par les anciens détenus communistes, Rassinier, lui-même
socialiste, fut contraint de se faire éditer par l'extrême-droite. De nos jours, l'oeuvre de
Rassinier, par sa documentation obsolète, ne peut plus être considérée que comme une
curiosité annonciatrice du négationnisme.
«La persécution des juifs dans les pays de l'Est» désigna jusqu'à la fin des années
quarante les traitements infligés aux juifs par les Allemands. Le jugement formulé à
Nuremberg porte sur la «persécution» et non le «génocide» et indique: «Comme
moyen d'aboutir à la «solution finale» - il aurait fallu ajouter: «telle qu'elle fut définie
fin mars 1942» - les juifs furent réunis dans des camps, où l'on décidait de leur vie ou
de leur mort selon leur condition physique. Tous ceux qui le pouvaient encore
devaient travailler; ceux qui étaient hors d'état de le faire étaient exterminés dans des
chambres à gaz, après quoi on brûlait leurs cadavres. Certains camps de
concentration, tels que Treblinka et Auschwitz, furent principalement choisis à cette
fin». Deux livres majeurs vont introduire une thèse particulière, toujours admise de
nos jours par une majorité de personnes, mais dont l'irrecevabilité s'impose
progressivement grâce à une étude des archives allemandes, générales et techniques,
dégagée de la manie obsessionnelle de voir partout des mots «codés» pour pallier le
manque de documents. Ce furent The Final Solution [La solution finale] du britannique Gerald Reitlinger en 1953 et The Destruction of the European Jews [La destruction des juifs d'Europe] de l'américain Raul Hilberg en 1961. Ces livres présentaient le massacre des juifs comme un génocide, froidement organisé et exécuté
de manière ininterrompue, avec comme point de départ, soit le texte de Mein Kampf
où HITLER pense que, si, durant la première guerre mondiale, douze à quinze milles
Hébreux avaient été soumis aux gaz du front et liquidés ainsi, un million de vies
allemandes auraient pu être épargnées, soit les mesures d'exclusion administratives de
1933 et comme but ultime, l'anéantissement massif à Auschwitz en 1944. Reitlinger
constata pourtant que les survivants avaient tendance à exagérer, pour mieux faire
comprendre le désespoir de leurs vies dans les camps, et que les chiffres avancés
étaient à minorer fortement. Alors que Reitlinger reconnaissait qu'il ne pouvait
expliquer certains épisodes en contradiction avec ce qu'il pensait avoir été une
extermination systématique planifiée par les Nazis, Hilberg passa sur ces détails
gênants. Des deux livres, le moins nuancé, celui de Hilberg, l'emporta et devint un
classique du genre, au point d'éclipser totalement celui de Reitlinger. Actuellement, à
la librairie du musée de l'Holocauste à Washington, on peut acheter TOUS les livres
parus sur ce thème, SAUF celui de Reitlinger. Rassinier attaqua le travail de
Hilberg, mais sans vrai succès faute de nouveaux documents d'archives. Au début des
années soixante-dix, un ingénieur en électricité américain, Arthur R. Butz, fut révolté
par l'argumentation de Hilberg, perçue comme une tromperie grossière, au point qu'il
considéra le dit «génocide de six millions de juifs» comme «La mystification du
vingtième siècle», appellation qui devint le titre de son livre de réfutation publié en
1976. Pas plus que Reitlinger, artiste et collectionneur, et que Hilberg, professeur de
sciences politiques, Butz n'était historien. Mais il apportait un esprit et des
connaissances scientifiques que les historiens traditionnels ne possèdent pas, leur
formation étant littéraire. Par ailleurs, je pense que la récente «conversion» du célèbre
historien anglais David Irving au révisionnisme est due, elle aussi, aux outrances de la
thèse génocidaire exposée par Hilberg.
Puis vint Faurisson et sa négation farouche des chambres à gaz homicides. Le
«professeur de Vichy» est un littéraire, ayant saisi le rôle primordial de l'instrument
du meurtre massif, mais inapte à en réfuter scientifiquement l'existence. Il se servit
des arguments de Butz et c'est la raison principale de l'absence de publication du livre
de Butz en français.
Parmi les disciples importants de Faurisson, sont à retenir l'italien Carlo Mattogno,
travaillant sur les fours de la firme Topf afin de démontrer que leur rendement
incinérateur était incompatible avec le nombre avancé des victimes à brûler et le
canadien anglais John C. Ball, spécialisé dans l'étude des photographies aériennes des
camps de concentration, tentant de prouver, entre autres, que Belzec n'était qu'un
camp de bûcherons. Leurs travaux sont souvent originaux, mais l'axiome de Faurisson
sur l'inexistence des chambres à gaz homicides les empêche d'obtenir des résultats de
valeur. Est à mentionner à part, pour son rôle de propagandiste acharné des thèses
révisionnistes, le Canadien anglais Ernst Zündel qui fut l'accusé des deux procès dits
de Toronto.
Ce mouvement révisionniste est mondial et attire des personnes de sensibilité
politique différente. Leur contestation provient souvent de la découverte de la fausseté
patente d'un épisode qu'ils croyaient définitivement établi. Cette tendance à réétudier
l'histoire de la seconde guerre mondiale est propre à notre époque, jugeant les faits
avec un demi-siècle de recul. Dernièrement aux Etats-Unis, le cinquantenaire de la
destruction des villes d'Hiroshima et de Nagasaki a opposé les anciens combattants à
des historiens américains «contestataires» ou «révisionnistes» sur l'emploi justifié ou
non de la bombe atomique. Écourter la durée de la guerre et éviter le sacrifice d'un
million de vies américaines pour conquérir le [638] Japon est l'alibi classique utilisé
depuis la fin de la guerre pour légitimer les deux tueries nucléaires. Justifications
totalement fausses. Le Japon cherchait désespérément une sortie «honorable» et était
prêt à se rendre à la condition intangible que l'empereur reste en place. Les pertes
américaines prévues pour une dernière opération militaire décisive oscillent entre
26.000 et 46.000 et sont sans rapport avec le million généralement admis. Les deux
bombes ont été larguées sur des civils japonais surtout pour intimider les Soviétiques
et accessoirement convaincre les contribuables américains que les milliards de dollars
engloutis dans le «Manhattan Project» ne l'avaient pas été en vain. Mais ce qui est
frappant, est la cécité volontaire des acteurs refusant de mettre en cause les «acquis».
Aux États-Unis, les anciens combattants l'ont emporté sur les historiens. Pour
l'instant.

Selon vous, faire évoluer l'histoire de la période 1940-1945 est toujours actuellement
impossible.
Sur des points mineurs, tout est possible ou, mieux, permis. Mais lorsqu'on touche aux
grandes questions ou aux affaires délicates, rien ne va plus. Soit une autorisation
officielle gouvernementale ou d'une autorité «reconnue» sera nécessaire, soit la
publication d'un résultat sera acceptée, mais le résultat en lui-même ne le sera pas et
restera lettre morte, soit enfin le texte tombera sous le coup d'une mesure
d'interdiction telle la loi Gayssot en France visant à réprimer la contestation de
«l'existence des crimes contre l'humanité sanctionnés par une juridiction française ou
internationale». Cette imbécillité réactionnaire communiste votée par une majorité de
députés soi-disants «progressistes» ne pourra encadrer politiquement l'histoire encore
très longtemps, parce que les acquis historiques ne sont pas fixés pour l'éternité et
fluctuent en fonction des décisions politiques, des documents retrouvés ou d'enquêtes
de recoupements inattaquables.
Le massacre des officiers polonais à Katyn fut attribué par le Tribunal de Nuremberg
aux Allemands, alors que tout le monde savait que c'était un mensonge éhonté. Dans
les années soixante-dix, un article sur Katyn incriminant les Soviétiques devait être
obligatoirement contre-balancé par un rectificatif communiste indiquant que les sales
fascistes allemands étaient les vrais et seuls coupables. Le gouvernement de l'URSS
n'a reconnu sa culpabilité qu'en 1990. De 1945 à 1990, il ne fut pas permis de dire la
vérité sur les responsables de la tuerie. Maintenant, ça l'est.
L'agression hitlérienne injustifiée de la pacifique Union des républiques socialistes
soviétiques en juin 1941 est un poncif que des millions d'enfants ont ânonnés sur les
bancs des écoles. Les premières grandes [639] victoires allemandes furent remportées
parce que la Wehrmacht surprit l'Armée rouge en plein mouvement de concentration,
quelques semaines avant qu'elle ne s'élance sur les autoroutes allemandes et n'essaie
de soumettre l'Europe. L'armement soviétique d'alors l'indique formellement: des
chars rapides inaptes à combattre en Russie; la formation d'un million de
parachutistes, corps offensif par excellence; des avions d'assaut entassés sur les
terrains en bordure de la frontière germano-soviétique. Détruire ses propres
fortifications frontalières est un signe qui, lui non plus, ne trompe pas sur les
intentions de celui qui l'entreprend. Ces faits sont connus, irréfutables, mais pour
Monsieur tout le monde, l'Allemagne a déclenché le conflit en se ruant à l'assaut d'un
calme pays dont l'industrie, proclamée planifiée pour la production de biens
d'équipement devant amplement combler les besoins du peuple, avait fabriqué
plusieurs dizaines de milliers de chars, entraînant une réduction honteuse du niveau de
vie des habitants, situation misérable maintenue par une terreur omniprésente.
Sans pousser jusqu'à l'absurde négation faurissonienne, l'étude des chambres à gaz
homicides réserve parfois des surprises de taille. A Dachau, la construction du
nouveau crématoire où se trouve la chambre à gaz dura de fin 1942 à avril 1943.
 Elle devait servir à liquider les juifs occidentaux. Grâce aux sabotages des détenus
l'aménageant, elle ne put être opérationnelle qu'en 1945, trop tard pour être utilisée.
Ces données furent fournies après-guerre par le Comité international de Dachau. Un
gazage fut décrit par un ancien détenu médecin, le Dr Blaha, ayant été d'après la
version officielle, qu'en 1945. Mais Rascher fut arrêté par la police allemande le 28
mars 1944, parce que sa femme, prétendant être enceinte à l'âge de 51 ans, avait fait
voler un nourrisson pour le présenter comme étant le sien. Donc le gazage rapporté
par Blaha ne peut se situer qu'en 1944, avant l'arrestation de Rascher. Si on a la
curiosité de monter au grenier du crématoire, on peut y constater que l'ensemble de
l'appareillage technique de la chambre à gaz fut posé et est pratiquement intact,
exceptées quelques dégradations dues à la soldatesque américaine. Sur le caisson de la
soufflerie est fixée une plaque de fabrication donnant les caractéristiques du
ventilateur et son année de construction: 1944. Le gazage eut lieu entre janvier et fin
mars 1944 et plus probablement à la mi-mars. Portant sur sept détenus, deux semblent
en être morts. Le gaz utilisé était un vésicant, tel l'ypérite ou la Iéwisite, dont Rascher
voulait étudier la diffusion à diverses températures. Il s'agit donc d'une chambre à gaz
médicale expérimentale, et rien d'autre, n'ayant servi qu'une fois. Le film d'horreur
tourné par les Alliés [640] sur les camps et projeté au Tribunal de Nuremberg ne
montre qu'une seule chambre à gaz présentée comme homicide et fonctionnant au
Zyklon-B, celle de Dachau, ce qui est doublement inexact. Alors que reste-t-il dans ce
film, exactement, des accusations de gazages homicides massifs?
J'ai envoyé à la directrice du musée de Dachau un article d'une vingtaine de pages sur
sa chambre à gaz dans lequel j'exposais plus longuement les documents, les faits et les
raisons me conduisant à penser que cette chambre n'avait pas été prévue sur les plans
initiaux du nouveau crématoire, qu'elle avait été aménagée dans la morgue de ce
dernier fin 1943 - début 1944 sur ordre du Dr Rascher pour mener à bien une série
d'expériences médicales sur la diffusion de gaz vésicants en fonction de la
température. A ce jour, je n'ai reçu aucune réponse à ce texte. Aveuglement de
l'acquis. Sans commentaire.
A l'occasion du cinquantième anniversaire de la libération des camps, un livre
souvenir sur la déportation fut publié par Marcel Ruby évoquant dix-huit camps de
concentration et d'extermination. RUBY ne se fonde que sur les historiques déjà
publiés et n'a pas entrepris de recherches dans les archives. Je ne retiendrai de son
travail que les chiffres des victimes cités. Pour Dachau, 70.000 alors que le musée du
site donne environ 30.000. Natzweiler-Struthof en aurait provoqué 11.000, chiffre
donné par le comité d'entretien du camp au mépris de la réalité, proche de 2 à 3.000.
Pour les camps d'extermination, Ruby se réfugie derrière Hilberg «dont les travaux
font autorité». Les chiffres de Hilberg proviennent de sources polonaises qui n'ont
jamais été corrigés depuis 1950. Mais en 1990, les Polonais déclarèrent ces chiffres
«émotionnels», parce qu'établis sous le choc de l'ouverture ou de la découverte des
camps de la mort et, mais sans s'en vanter, durant la période stalinienne. Ce système,
consistant à s'abriter derrière l'autre, devient dangereux dès que le premier de la file se
retire. J'ai essayé de cerner le nombre de victimes des camps dits d'extermination sur
des bases matérielles: surface de la chambre à gaz et quantité de personnes pouvant y
tenir, temps d'un gazage, nombre de gazages quotidiens, nombre de convois arrivant
par jour en fonction des capacités réelles des chambres, etc. Par rapport à ceux de
Hilberg, empruntés aux Polonais, voici les chiffres que j'obtiens. Chelmno: de 80 à
85.000 au lieu de 150.000; Belzec: de 100 à 150.000 au lieu de 550.000; Sobibor: de
30 à 35.000 au lieu de 200.000, Treblinka: de 200 à 250.000 au lieu de 750.000;
Maïdanek: moins de 100.000 au lieu de 360.000. En fait, Ruby, tout en se targuant de
l'autorité de Hilberg, ne tient pas compte de ses rectifications - mineures - des chiffres
polonais et produit ces derniers dans leur exagération d'origine. Le coefficient
multi[641]plicateur émotionnel varie de 2 à 7 et est en moyenne de 4 à 5. Cette
moyenne s'applique parfaitement à Auschwitz.
Dans le cas de ce complexe concentrationnaire, dès 1945, les SS ont reconnu qu'ils
avaient perdu toute notion du nombre de morts, parce qu'il y en avait trop pour que
l'esprit humain puisse le concevoir. Quant aux anciens détenus, leurs chiffres sont le
fruit de rumeurs d'époque amplifiées par leur imaginaire. Les acteurs du drame sont
incapables de fournir le moindre chiffre valable, aussi bien les SS débordés par la
mortalité épidémique et par celle qu'ils provoquaient que les détenus faute
d'information concrète. Seuls les historiens peuvent tenter d'obtenir un ordre de
grandeur chiffré sûr. Le chiffre de quatre millions de victimes, fixé après la guerre
après négociations entre les responsables communistes soviétiques et polonais, est de
propagande et sans fondement historique. Même un Ruby en convient et avance 1,2
million. Le chiffre le plus sérieux avant mon estimation est celui d'un historien
polonais, Franciszek Piper, avançant 1,1 million en 1990. De mon côté, j'ai proposé
800.000 puis, après une étude plus détaillée de la déportation des juifs de Hongrie,
700 000. Ruby, comme d'ailleurs Vidal-Naquet, qui n'y connaissent rien, ne peuvent
que trouver mon résultat trop faible. Le gouvernement polonais n'a pas retenu l'étude
de Piper et a imposé, pour des raisons politiques, qu'un million et demi de personnes
étaient mortes à Auschwitz-Birkenau.
L'obstination des anciens déportés à défendre des faits ou des chiffres historiquement
inacceptables compromet gravement leur volonté de transmission de la «Mémoire».
En imposant par une loi répressive les jugements du Tribunal de Nuremberg, ils tuent
la seule partie relativement valable de ce dernier, à savoir la publication des
documents allemands à charge. Quelle valeur pourront retenir les générations futures
d'un procès où les traductions allemandes furent biaisées, certains dossiers élagués
(cas du dossier SS sur le nouveau crématoire de Dachau), avec en prime, un film
d'accusation ne reposant plus sur rien? Je ne compte pas les tortures infligées aux
accusés lors des procès dits de Dachau.
Quant au massacre des juifs, plusieurs notions fondamentales doivent être entièrement
reprises. Les chiffres avancés sont à revoir de fond en comble. Le terme «génocide»
ne convient plus. Des 1961, HILBERG employait le mot «destruction» dans le titre de
son livre. Il faut abandonner le concept d'une extermination systématique programmée
dès l'origine. Il eut plutôt une radicalisation progressive, imposée par la guerre qui
elle-même exacerbait l'antisémitisme violent de Hitler et de son entourage direct. Des
mesures de plus en plus coercitives, de plus en plus drastiques, furent élaborées et
appliquées pour aboutir en avril 1942 au «massacre de masse».
Il semble que pour vous, le révisionnisme aurait de bons côtés et qu'on pourrait
dialoguer avec eux, ce qu'un homme comme Vidal-Naquet refuse absolument.
Comment expliquer cette divergence?
Un Italien comme Carlo Mattogno est incontestablement devenu le meilleur chercheur
du côté révisionniste. Dans le premier numéro des
Annales d'histoire révisionniste du
printemps 1987, l'article principal est de lui et s'intitule «Le mythe de l'extermination
des juifs». La méthode utilisée par Mattogno repose sur la confrontation des
témoignages, habituel procédé faurissonien, et conclut, après avoir relevé leurs
multiples contradictions, à leur irrecevabilité et à l'inexistence des chambres à gaz. Il
ne cherche surtout pas à expliquer ces divergences. Au sujet du nombre des fours
d'incinération à Birkenau, existaient cinq fours trimoufle dans le crématoire II, idem
pour le III, deux fours quadrimoufle dans le crématoire IV, idem pour le V, soit en
tout 46 creusets incinérateurs. Lorsque le commandant Höss parle de 10 fours, il
évoque les 10 fours trimoufle des crématoires II et III. Quand il dit 15 fours, il s'agit
des quinze creusets incinérateurs équipant le crématoire II ou le III. Un ancien
médecin légiste juif hongrois, le Dr Miklos Nyiszli, ayant travaillé avec le Dr SS
Mengele au crématoire Il, y décrivit la marche des 15 fours, chiffre aussi avancé par
un membre du
Sonderkommando, Dov Paisikovic. Là encore, les deux témoins se
réfèrent aux 15 creusets incinérateurs des crématoires II ou III. Des situations
contradictoires peuvent pareillement être expliquées à condition de connaître
l'évolution des bâtiments crématoires. Höss affirme qu'«au bout d'un temps très court,
le crématoire IV fut hors d'usage et on ne l'utilisa plus jamais depuis» alors qu'un
autre SS de la Section politique, Pery Broad, soutient que «les quatre crématoires
marchaient à toute vapeur. Mais bientôt, à la suite d'une surcharge continue, les fours
tombèrent en panne, et seul le crématoire IV fumait encore». Höss fait référence
indirectement à la courte garantie de deux mois accordée par la firme Topf d'Erfurt
pour le double four quadrimoufle du crématoire IV parce que son utilisation était
excessive, ce qui provoqua son arrêt vers la mi-mai 1943. Höss évoque là un fait très
précis, confirmé par une note d'avis de l'ingénieur Kurt Prüfer du 8 avril 43, retrouvée
récemment dans les archives de l'ancienne Topf et une lettre du 10 avril 43, signée par
Ernst-Wolfgang Topf et conservée au musée d'Oswiecim depuis 1945. L'épisode du
crématoire IV «fumant» en solitaire - dans l'imaginaire de Broad - lors de l'été 1944 se
rapporte aussi à un moment déterminé de l'histoire de Birkenau: fin mai 1943. Seul le
V fonctionne, le II étant arrêté, le III inachevé et le IV hors service. Qu'il se soit
trompé de date et de crématoire est dans l'ordre des [643] choses. Les bureaux de la
section politique se situaient au camp principal d'Auschwitz, près du crématoire I.
Broad ne connaît que peu Birkenau où il se rend rarement, excepté parfois lors de
l'arrivée de convois. Une vue directe des crématoires IV et V n'est Pas possible de la
rampe de sélection de Birkenau et une confusion de bâtiment est vraisemblable. Par
contre, Broad a raconté avec justesse un épisode concernant l'exposition d'une
trentaine de photos des crématoires dans l'entrée des services de la Bauleitung
d'Auschwitz, parce qu'il a participé à son interdiction. Le nombre de photos connues
des crématoires de Birkenau est de 25 (en fait 26, car une du II manque toujours). Il
est très aisé de «démolir» un témoignage. Le replacer dans son contexte et l'expliquer
sont autrement difficiles.
Malgré ses limitations évidentes, ce premier travail révisionniste de Mattogno lui
ouvrit des pistes qu'il exploita ensuite: la question du nombre des juifs hongrois
déportés à Birkenau et celle du rendement des fours d'incinération de la Topf. Pour les
juifs hongrois, il eut raison dès 1987 en affirmant que les déportations durèrent de mai
à juin 1944, alors que Danuta Czech, la rédactrice polonaise du
Calendrier des événements au camp de concentration Auschwitz-Birkenau, 1939 -1945 et aussi
Wellers, qui utilisait cette source sans contrôle, soutenaient qu'elles s'étaient déroulées
de mai à octobre 1944. Wellers refusa de correspondre avec Mattogno sur ce sujet en
partant du postulat qu'on ne discute pas avec les révisionnistes. Un mandat
d'arrestation fut même lancé par un juge zélé contre Mattogno au cas où il pénétrerait
sur le territoire français. Czech avait publié dans les années soixante son Calendrier à
partir duquel WELLERS avait calculé le nombre des victimes d'Auschwitz (1,6
million au lieu de 4). Un second, corrigé, le fut en 1989. Des 91 convois répertoriés, il
n'en restait qu'une cinquantaine. Czech s'était trompée et avait assimilé des transferts
de camp à camp dans Birkenau à l'arrivée de convois. Ainsi lorsque Mengele avait
pris le 15 juillet 1944 deux jumeaux juifs hongrois du secteur dit «Mexico» pour les
placer à l'infirmerie du camp BIIf après les avoir immatriculés, Czech avait estimé
qu'un convoi de trois mille personnes était arrivé, que seules deux personnes avait été
sélectionnées et immatriculées et que les 2.998 restantes avaient été gazées. Comme
Czech ne se retrouvait plus qu'avec cinquante convois comptant 150.000 personnes au
lieu des 438.000 qu'elle croyait avoir été déportées à Auschwitz, elle augmenta pour
«compenser» le chiffre des convois de mai à juin en affirmant - sans preuves - que tel
jour, au lieu d'«un» convoi, «des» convois s'étaient présentés à Birkenau, se rendant
coupable de faux historique. Aucun mandat d'arrestation international ne fut pourtant
lancé contre CZECH. Quant aux comptes de Wellers, après la parution du
second Calendrier, ils ne valaient plus rien, ce qui m'empêcha pas les Polonais
d'utiliser les résultats erronés de Wellers comme une référence «sérieuse»...
Mattogno a aussi étudié le premier gazage homicide à Auschwitz, dit par les Polonais
s'être déroulé du 3 au 5 septembre dans les caves du Block II au camp principal. Ce
gazage, selon les Polonais, est la conséquence directe de l'ordre d'extermination des
juifs reçu par Höss à Berlin de la bouche de Himmler et ce, à l'été 1941, sauf qu'il
porte sur les prisonniers de guerre russes et des malades incurables et non des juifs.
Mattogno a conclu dans un premier temps que c'était une pure invention, puis dans un
second que cet épisode ne reposait sur aucun fondement historique. Je me suis
entretenu de cette question avec les Polonais. Voici la réponse un peu leste: «Ce
gazage a débuté le jour anniversaire d'un détenu qui y participait, donc il se souvient
exactement de la date». Le détenu en question, nommé Michal Kula, avait déclaré s'en
souvenir avec précision, puisque c'était le jour anniversaire de son arrivée au camp, le
15 août... et non le 3 septembre. On sait maintenant que Höss n'a pas reçu l'ordre de
tuer les juifs à l'été 1941, mais début juin 1942. Si ce premier gazage a eu lieu, il se
place en décembre 1941, voire en janvier 1942 et n'a aucun lien avec le massacre des
juifs.
La mise en doute des capacités incinératrices des fours Topf est une vieille affaire
déjà effleurée par Faurisson. Il lui avait suffi de consulter n'importe quel spécialiste
des crématoires civils actuels pour s'entendre répondre qu'une incinération normale -
corps et cercueil - demandait entre une heure et une heure et demie. En comparant ce
rendement avec celui obtenu dans les fours de Birkenau, capables selon les dires de
détenus de réduire en cendres vingt milliers de personnes par jour, ce qui représente la
crémation d'un cadavre en une dizaine de minutes, il avait crié à l'impossibilité
technique, ce qui était loin d'être original. Son «indignation» repose sur une double
erreur, car Faurisson avait rapproché deux méthodes d'incinération différentes, l'une
civile et l'autre concentrationnaire, et s'était appuyé sur les chiffres irréels avancés par
les détenus. Mattogno a essayé d'affiner le raisonnement du «maître» en étudiant les
possibilités techniques des fours d'incinération allemands avant la seconde guerre
mondiale. Il a véritablement ouvert avec cette investigation une nouvelle voie de
recherche qui, débarrassée des blocages révisionnistes, offre des perspectives
prometteuses, mais qui ne purent être exploitées qu'après la découverte début 1995
des archives de l'ancienne firme Topf et en particulier des plans et des documents
restants de la division D IV - celle des crématoires - de l'ingénieur Kurt Prüfer.

Mattogno, pour sa part, a confronté les fours des ingénieurs Volckmann et
Ludwig de Hambourg à ceux de la Topf d'Erfurt afin d'établir que le rendement de ces
derniers était insuffisant. Sans pièces d'archives, il ne peut que se fourvoyer, surtout si
son but est de démontrer que les fours Topf étaient de la camelote. La mise en avant
par Mattogno du four Volckmann-Ludwig, exploité par la firme H. R. Heinicke de
Chemnitz, est pourtant historiquement prémonitoire. Les essais du four Volckmann-
Ludwig ont conduit les deux inventeurs à opérer des incinérations en série à
Hambourg, autorisées parce que cette cité était une ville libre et non soumise aux
règlements prussiens sur l'incinération. Incinérer en série consistait à introduire un
premier cercueil dans le creuset incinérateur de ce four, puis une fois cette charge
réduite en cendres grossières, à les placer dans le cendrier de post-combustion où
s'achevait l'incinération pour obtenir des cendres fines et blanches. Le creuset étant
vide, on pouvait y enfourner un second cercueil. Mais, cette méthode impliquait la
présence simultanée de deux corps différents dans le four, ce qui était interdit
généralement dans les états allemands. Ainsi un rendement incinérateur de dix-sept
corps par jour pouvait être atteint. Ce qui fut pratiqué à Birkenau n'est que l'extension
de ce procédé. La rivalité entre les deux firmes, la Heinicke et la Topf, pour la
conquête du marché des crématoires civils allemands, a entraîné dès 1933 plusieurs
procès qui ne s'achèveront qu'en octobre 1948 à l'avantage de la Topf. Ce succès fut
commercialement mitigé mais techniquement écrasant, puisque M. Jaecker, le
propriétaire de la Heinicke, sans toutefois convenir que l'arrangement du four VL
avec ses injecteurs d'air froid était loin de valoir celui du four à air chaud de Prüfer,
regrettait l'absence de ce dernier - alors aux mains des Soviétiques - et déplorait que
les deux firmes ne se soient pas associées avant-guerre au lieu de s'entre-déchirer par
voie judiciaire. La phase terminale de ces procès fournit des informations techniques
nécessaires pour comprendre le développement des fours civils Topf avant-guerre,
l'élaboration du modèle à air chaud pouvant mener une incinération complète en
seulement 35-40 minutes, sa construction en Allemagne orientale jusque dans les
années soixante-dix et son exploitation dans ce pays jusqu'en 1993-1994. Quant à
l'incinération en série concentrationnaire, un rapport de septembre 1942 de l'ingénieur
Fritz Sander, le responsable de Prüfer, en décortique les divers aspects et montre
qu'une comparaison directe avec l'incinération civile n'est pas valable.
J'ai rencontré plusieurs fois Carlo Mattogno. Nos confrontations furent intéressantes
et instructives. J'ai cessé tout dialogue avec lui dès que je me suis aperçu qu'au lieu de
prendre acte des documents Topf que j'ai publiés, pièces incontestables puisque
rédigées par les ingénieurs de la firme, il se réfugiait derrière une argumentation de
mauvaise foi pour les nier.
Le refus de dialogue préconisé par Vidal-Naquet revient à dire hypocritement «Ne
faites pas ce que j'ai déjà fait». Quelques mois avant que Thion ne publie son
Vérité politique ou vérité historique?  Vidal-Naquet eut avec lui en présence d'un tiers un
entretien de plusieurs heures. Propos d'intellectuels, fiers de leur conscience de
gauche, de la justesse de leurs pensées et de la sûreté de leurs raisonnements. On parla
d'antisémitisme - habitude de gauchistes pour évoquer une attitude qui n'existe plus en
France, sauf dans leurs délires - on mentionna un petit «techniquement possible», on
s'épancha et on s'étendit de long en large sur les «croyances». Les véritables questions
matérielles ne furent pas abordées, étant indignes de ces beaux esprits littéraires. Des
lettres furent échangées entre Vidal-Naquet et Thion. On s'y tutoie tendrement. Y sont
mentionnées une seule fois des chambres à gaz, mais dans le cadre de l'action T 4
(euthanasie des malades mentaux) et sans rapport avec les gazages homicides
d'Auschwitz. Tout cela est lamentable et nul. Le dénominateur commun de Vidal-
Naquet et Thion est que l'argent qui les fait vivre vient de l'Éducation nationale,
comme pour Faurisson. Le plus instructif de ces échanges révélés par Thion est la
stupéfiante versatilité de Vidal-Naquet. Faurisson, ayant avancé que le «Journal»
d'Anne Frank est un faux, Vidal-Naquet l'admit. Puis, à la suite de la publication d'un
rapport d'expertise hollandais, il patronna une édition du Journal révisé. Dans une
affaire beaucoup plus grave et après dénonciation justifiée de Gitta Sereny, Vidal-
Naquet rejeta Au nom de tous les miens de Martin Gray, écrit par Max Gallo, le
passage du «témoin» à Treblinka ayant été inventé. Ce qui n'empêcha pas la
réalisation d'un film comportant l'épisode Treblinka, passé et repassé à la télévision.
Une bande dessinée fut même entreprise, réalisée par un des plus célèbres graphistes
français, Paul Gillon. Deux albums évoquant la vie du Ghetto de Varsovie parurent.
Mais la série capota devant Treblinka et le troisième album devant traiter du camp
d'extermination et de ses huit chambres à gaz ne vit pas le jour, et pour cause. Malgré
cela, Vidal-Naquet, ayant rencontré Gray et au vue d'«attestations» polonaises que ce
dernier lui montra, reconnut s'être trompé et la réalité de son séjour à Treblinka. Les
«attestations» ne furent jamais rendues publiques.
Lorsque mon livre fut publié, je reçus de Vidal-Naquet une lettre de félicitations où il
reconnaissait qu'il n'avait jamais pensé que mes recherches techniques puissent
aboutir et déboucher sur un tel résultat.
Trois jours après, je recevais une lettre de réprimandes, regrettant la première,
parce que j'avais expliqué à un journaliste du Monde pourquoi un amateur avait pu et dû s'occuper de cette question. Les - plus nombreux qu'on ne le pense - universitaires qui l'ont abordée, se trouvèrent après étude du dossier reposant en majorité sur des témoignages et, faute de documents inconnus, SS ou techniques, qu'ils auraient découverts dans les archives s'ils s'en étaient donnés la peine, devant un choix crucial.
Soit continuer en basculant du côté faurissonien et compromettre sa carrière, soit
abandonner le sujet pour conserver son poste. Le journaliste avait résumé mes dires
par «couardise» universitaire, mot que je n'emploie pas - j'aurais utilisé «lâcheté»,
mais qui s'applique parfaitement à l'attitude des dits «professeurs» face à ce thème
sensible. Vidal-Naquet peut se comparer à une girouette creuse tournant au vent des
publications et de l'actualité parce que lui-même n'a pas entrepris de recherche
fondamentale pour étayer ses déclarations péremptoires et moralisatrices.

J'avoue ne pas comprendre l'intérêt que vous portez, de même que Carlo Mattogno,
aux fours d'incinération non concentrationnaires puisque l'argument essentiel des
révisionnistes est la négation des chambres à gaz. Comment l'expliquez-vous?
L'étude des fours en elle-même est fastidieuse pour le commun des mortels. L'intérêt
vient des retombées. D'ailleurs, s'en tenir aux fours Topf est trop limité et c'est
l'ensemble des fabrications de la firme d'Erfurt qu'il faut prendre en compte parce que
quatre de ses domaines d'activité se rapportaient à la machinerie du meurtre de masse.
Un: l'incinération des corps par sa division D IV (ingénieur Prüfer avec les
responsables des quatre sous-divisions de la D, les ingénieurs Sander et Erdmann).
Deux: l'aération et la désaération des locaux, la climatisation, par sa division B
(ingénieur Schultze); Trois: le gazage des réserves de céréales à l'Areginal - sous
forme liquide jusqu'a 32'C comme l'acide cyanhydrique l'est jusqu'a 27'C - par sa
division A. Quatre: la fabrication de portes métalliques étanches au gaz par sa division
C. Comme seules les divisions D IV et B furent sollicitées par les SS, cette
polyvalence inutilisée éclaire différemment le dit génocide des juifs.
Malgré ses écrits officiels, Mattogno reste très réservé sur l'impossibilité technique
des chambres à gaz homicides. Pour lui, le Schwerpunkt se situe au niveau des fours
Topf, insuffisants pour incinérer quotidiennement des milliers de prétendus gazés. Il
représente la position de retrait des révisionnistes, à activer au cas où la première
ligne de Fau[648]risson s'effondrerait. Il est important de connaître ses travaux afin de
le combattre sur son terrain. Mais ce combat devient mineur face aux données
nouvelles dégagées par l'étude des fours, ou mieux de l'incinération en général. Il
s'agit de la question des fumées. Tous les détenus survivants des camps de
concentration nazis - sauf de rares exceptions - parlent de cheminées fumant vingtquatre
heures sur vingt-quatre en crachant de hautes flammes visibles à des kilomètres
aux alentours. Les révisionnistes, après avoir étudié toutes les photos aériennes
d'Auschwitz-Birkenau prises de mai 1944 à janvier 1945, affirment ne voir aucune
fumée sortir des cheminées des crématoires, ce qui, pour eux, signifie qu'ils ne
fonctionnaient pas, et ce en plein massacre des juifs de Hongrie.
Lors du premier congrès européen sur l'incinération à Dresde en 1878, des règles
strictes furent définies pour la conduite des incinérations. Les entreprises édifiant les
fours durent s'y soumettre. L'une de ces règles indiquait que «les produits de
l'incinération ne doivent pas empester le voisinage». Les fumées et les odeurs étaient
proscrites. La firme Topf, dont l'activité première, dès sa fondation, était la
construction des foyers en tout genre, avait la hantise des émissions de fumées, signe
d'un mauvais réglage du foyer. Un de ses prospectus commerciaux interpellait les
futurs clients avec cet avertissement: «Si votre cheminée fume, vous perdez de
l'argent». Les fours d'incinération TOPF ne fumaient pas et ceux des firmes
concurrentes non plus. Au début de sa carrière, le four Volckmann-Ludwig fut accusé
d'émettre des fumées noires, ce qui était la pire critique qu'on puisse porter contre lui.
Certaines photos des centres d'euthanasie dépendant de l'action T 4 les montrent avec
une abondante fumée montant au ciel et censée prouver qu'on y brûlait les corps des
malades mentaux tués. Ce sont de vulgaires montages photographiques. Le ou les
fours d'incinération de ces établissements de soins, construits souvent avant leur
affectation à la T 4, ne devaient pas fumer, puisque l'installateur y avait été contraint
par les règlements et la concurrence du marché.
Interrogé sur l'incinération concentrationnaire par les Soviétiques après son arrestation
en mars 1946, Prüfer leur en expliqua les caractéristiques. Les fours d'incinération
civils fonctionnent avec de l'air préalablement chauffé, si bien que le cadavre
s'incinère plus vite et sans fumées. Comme les fours dans les camps furent structurés
autrement, l'emploi de ce procédé était impossible. Les cadavres s'incinéraient plus
lentement et des fumées se développaient. Pour contrer cela, il suffisait de pulser de
l'air dans le creuset incinérateur. En effet, les trois fours bimoufle du crématoire 1 du
camp central d'Auschwitz étaient équipés de souffleries. Les fours trimoufle montés
au crématoire de Buchenwald et dans les crématoires II et III de Birkenau
pareillement. En opérant ainsi, avec une technique identique au soufflage d'air sur un
feu de forge, Prüfer obtenait une durée de crémation proche de ses fours civils et
évitait la formation de fumées. Par contre, les fours à huit moufles des crématoires IV
et V n'en comportaient pas, mais compensaient cela par un fort tirage avec deux
cheminées de seize mètres de haut. Quant aux fours concentrationnaires de la
Heinrich Kori de Berlin, chauffés au mazout ou au coke, ils furent fabriqués ou édifiés
sans ventilateurs.
Toute généralisation est à exclure. La contestation de Rassinier provient d'une
généralisation abusive affirmant que tous les camps de concentration possédaient une
chambre à gaz [la contestation de Rassinier ne porte pas sur les chs [chambres?] mais
sur la fausseté des témoignages sur les camps et sur la responsabilité pour le moins
partagée dans le déclenchement de la deuxième guerre mondiale et dans les crimes
qui y furent commis, pour lesquels les preuves élémentaires n'avaient pas été
apportées. Il suffit de le lire pour le comprendre. Les chambres à gaz n'ont jamais été
un thème central pour Rassinier.] Pour les fours, chaque situation est à traiter
séparément et en fonction de la chronologie. Le nouveau crématoire de Maïdanek fut
équipé de cinq fours Kori monomoufle groupés sans ventilateur et reliés à une
cheminée collective. Dire que cette cheminée fumait est vrai. Le nouveau crématoire
de Dachau reçut quatre fours Kori monomoufle sans ventileurs donnant dans une
cheminée qui, bien sûr, fumait. A la libération, la suie maculait extérieurement
presque toute la hauteur de la cheminée. Le four Kori chauffé au coke et sans
ventilateur du crématoire de Natzweiler-Struthof avait une cheminée métallique. Elle
rougeoyait et fumait. Par contre, la cheminée du crématoire-I d'Auschwitz avec ses
trois fours bimoufle Topf n'a jamais fumé. Aucun des milliers d'anciens détenus
polonais, qui ont vécu à deux pas de ce crématoire, ne s'est plaint ni des fumées ni de
l'odeur. La villa où vivait la famille de Höss est à proximité directe du crématoire-I. Si
Prüfer n'avait pas fait son métier correctement, il ne fait aucun doute que l'ingénieur
se serait fait rabrouer et qu'il n'aurait jamais pu obtenir les contrats suivants pour
Birkenau. Car là, tout change miraculeusement. Au crématoire-II, même fours Topf,
mais trimoufles, ventilés comme les bimoufles et connectés à une grosse cheminée
collective. De celle-ci, jaillissaient d'immenses flammes de deux ou trois mètres de
haut se terminant par une grande colonne de fumée «obscurcissant les cieux». Une
scène du film
La liste de Schindler illustre avec un criant réalisme cette image
symbolique, sans rapport avec la réalité, et que même David Olère dessinera. Olère
m'a raconté pourquoi il avait été obligé de présenter ainsi le crématoire-III. Rentré de
déportation très faible, il dut s'aliter et pourtant, les gens se pressaient à son chevet
pour lui demander des nouvelles des leurs. Afin de leur faire comprendre le drame
avec une simplicité frappante, Olère dessina le crématoire-III en vue aérienne avec sa
cheminée crachant une fumée noire renfermant des visages des morts. En répondant
par cette allégorie aux questions, il eut la paix et put se reposer. Dans ses dessins
ultérieurs, Olère continuera a représenter [650] les cheminées expulsant feu et fumée.
Illustrant une des trois fosses d'incinération en activité derrière le crématoire V en
mai-juin 1944, il figura ce dernier avec ses deux cheminées crachant des flammes
alors que le four à huit moufles était arrêté.
J'ai fait réaliser par Mme Vaillant-Couturier un mini-sondage auprès des anciens
détenus de Birkenau sur les fumées dont ils se souvenaient durant l'été 1944. Sur six
interrogés, tous répondirent que les cheminées fumaient. Trois que les fumées étaient
blanches, trois qu'elles étaient noires. Quoique nulle fumée ne s'élevât des cheminées
des crématoires-Il et III, les témoins ne mentent pas, ils confondent. Ils décrivent des
fumées, blanches ou noires, suivant les moments, qui provenaient des fosses
d'incinération à ciel ouvert du crématoire V et les assimilent à l'ensemble des quatre
crématoires. Comme preuves, existent deux photos prises par la résistance polonaise
de la fosse nord du crématoire V avec de la fumée blanche et deux photos aériennes
du 31 mai 1944 de cette fosse en activité avec un croissant de fumée noire s'élevant
au-dessus. Le plus dérisoire, ce sont les explications révisionnistes. Faurisson raconte
que la fumée blanche provient de feux de branches de bouleaux, allumés pour chasser
les odeurs. Lesquelles? Mystère. Quant à John C. Ball qui a véritablement découvert
les photos aériennes du 31 mai 1944 et qui est un expert dans l'interprétation de telles
vues, il ne les voit pas. C'est beaucoup plus simple.
En résumé, les révisionnistes se servent d'un fait vrai, absence de fumées au dessus
des crématoires II et III, fait confirmé techniquement et photographiquement, et
s'appuient sur une donnée imprécise, les dires des anciens déportés à Birkenau [ce
qu'on appelle des témoignages, c'est-à-dire des déclarations reçues en justice comme
faisant foi], pour conclure qu'il n'y a pas eu de massacre, que le camp était un camp de
vacances entouré d'une calme campagne où travaillaient de paisibles agriculteurs
polonais et que les chambres à gaz sont une triste fumisterie.

Quels sont vos projets pour l'avenir?
J'attends depuis des années le ou les livres de Carlo Mattogno dans le ou lesquels il
devrait démanteler brique par brique - parce qu'on étudie des fours - mon travail sur
les crématoires d'Auschwitz. Faites comme moi, prenez votre mal en patience et
attendez ce formidable travail qui anéantira le mien.
Trêve de plaisanterie. Après y avoir été autorisé par le directeur, Mrudo Braun, je suis
en train d'étudier les documents techniques restants de la TOPF conservés dans les
caves de l'usine d'Erfurt qui se dénomme depuis la chute du Mur de Berlin l'
Erfurter Malzerei und Speicherbaun , en abrégé «EMS». Ce que j'ai retrouvé confirme la
justesse de mon livre à près de 90-95 %. C'est ce qui me gêne le plus, car ne
restent que des points mineurs à rectifier. Heureusement, la découverte de 33.000
photostats de plans de la firme, illustrant son activité de 1932 à 1948, permet d'en
extraire près de 600 plans de la division «Construction de crématoires» et de suivre
presque au jour le jour sa production et l'évolution des recherches menées par
PRÜFER pour aboutir au four d'incinération Topf à air chaud. De plus, le dossier des
procès Heinicke contre Topf et vice versa renferme six plans originaux, choisis par
Prüfer, pour illustrer le développement de ce four. Le futur livre négateur de
Mattogno, s'il paraît un jour, ne pourra rien contre les pièces techniques Topf
retrouvées.
En 1996, je commencerai un livre sur l'entreprise Topf, de sa création à Erfurt en
1878 à sa dissolution pour sa partie occidentale à Wiesbaden en 1963. Portant
essentiellement sur le degré d'engagement et la responsabilité de la firme dans les
marchés concentrationnaires, sur les questions d'incinération, il abordera aussi
certaines méthodes de gazages qui furent aussi une spécialité de la Topf. Les
documents Topf éclairent le début de l'incinération concentrationnaire durant le très
dur hiver 1939-1940 (dossier «Krematoriumbau, Schawkin, SMA», photostat n'
19.455 du crématoire du camp de Dachau avec deux fours civils chauffés
électriquement et archives familiales Topf), en expliquent les paramètres (rapport
Sander de septembre 1942), donnent la véritable cadence incinératrice des crématoires
de Birkenau (note de Prüfer de septembre 1942), prouvent une fois de plus mais est-ce
bien nécessaire? - l'aménagement d'une chambre à gaz dans le crématoire Il (note de
Sander de février 1943) et apportent des réponses à des épisodes à peine mentionnés
dans la correspondance connue (cas de l'hypothétique crématoire du camp de travail
de Krakau-Plaszow avec le photostat n' 35. 284). Y seront de plus traitées toutes les
chambres à gaz nazies et plus particulièrement celles utilisées dans les camps de la
mort, mais ce, sous une forme qui reste à définir et avec des résultats inhabituels.


Quelles sont vos conclusions sur toute cette affaire?
Michel de Boüard, ancien «Nacht und Nebel» à Mauthausen, a estimé que «le dossier
[du système concentrationnaire] est pourri». D'une part, le ressentiment et la
vengeance, ont primé sur l'apaisement. Puis la mémoire sur l'histoire. D'autre part, la
mainmise des communistes sur les principaux organes de commande dans les camps,
la formation après la libération d'associations sous leur contrôle et l'établissement
durant cinquante ans d'une histoire des camps «démocratiquement populaire», ont
introduit le virus de la langue de bois antifasciste. Approxima[652]tion, exagération,
omission et mensonge caractérisent la majorité des récits de cette période. Le discrédit
unanime et sans appel dont sont frappés les écrits communistes ne peut que déteindre
sur une expérience concentrationnaire viciée par leurs idées et l'annihiler.
Peut-on redresser la barre?
Il est trop tard. Une rectification générale est humainement et matériellement
impossible. Tout changement historique entraîne une dévalorisation de cette mémoire
fixe et présentée comme définitive. Or, de nouveaux documents surgiront
inévitablement et bouleverseront de plus en plus les certitudes officielles. La forme
actuelle, pourtant triomphante, de la présentation de l'univers des camps est
condamnée. Qu'en sauvera-t-on? Peu de choses. En effet, magnifier l'univers
concentrationnaire revient à résoudre la quadrature du cercle, à transmuter le noir en
blanc. La conscience des peuples n'aime pas les histoires tristes. La vie d'un zombi
n'est pas «porteuse», d'autant que la douleur subie a été ensuite exploitée et
monnayée: décorations, pensions, postes, influence politique. On ne peut à la fois être
victime et privilégié, voire bourreau à son tour.
De tous ces faits, terribles parce qu'ayant provoqué la mort de femmes, d'enfants et de
vieillards, ne survivront que ceux établis. Les autres sont destinés aux poubelles de
l'Histoire.

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